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Biodiversité de sols en cours de restauration lors de leur mise en jachère : des interactions plus fortes entre organismes, un flux plus important de carbone vers le sol

COMMUNIQUE DE PRESSE - Dans le cadre du projet européen EcoFINDERS coordonné par l’Inra, les chercheurs ont étudié l’évolution de la biodiversité de sols après leur mise en jachère comme stratégie de restauration. Cette étude a été rendue possible par la mise en œuvre d’un dispositif unique d’observation de longue durée. Son originalité repose également sur le fait que les chercheurs ont pris en compte une gamme très large d’organismes du sol (microorganismes et faune) en analysant leur diversité mais également leurs réseaux d’interactions. Les résultats, publiés dans Nature Communications, montrent une augmentation des connexions entre groupes d’organismes dans le sol, accompagnée d’une incorporation accrue de carbone. La compréhension de ces phénomènes pourrait conduire à identifier des pratiques agricoles favorables au transfert et au stockage de carbone dans les sols.

Publié le 14 février 2017

illustration Biodiversité de sols en cours de restauration lors de leur mise en jachère : des interactions plus fortes entre organismes, un flux plus important de carbone vers le sol
© INRAE, Jean Weber

Les recherches ont été menées dans le cadre du programme EcoFINDERS représentant un consortium unique du fait de sa taille (23 partenaires), de la gamme des expertises couvertes (en particulier des types d’organismes pris en compte) et des moyens mis en œuvre (notamment les observatoires de longue durée). Parmi ces dispositifs, l’observatoire situé aux Pays-Bas était dédié à l’effet de la mise en jachère.

Dans cette étude, les chercheurs se sont intéressés à l’évolution de la biodiversité au cours du temps lors du processus de restauration de sols mis en jachère à l’aide d’une chronoséquence s’étalant jusqu’à 31 ans de non culture des sols. Les analyses de biodiversité et d’interactions entre organismes ont été associées à celles de l’incorporation du carbone au sein du réseau trophique du sol en utilisant du dioxyde de carbone marqué (13C).

Des interactions entre organismes plus nombreuses, un flux de carbone plus important vers le sol

Les chercheurs ont constaté une augmentation des connexions entre groupes d’organismes dans les sols au cours du processus de restauration. Ils ont également observé une progression de la diversité des champignons mycorhiziens à arbuscules (qui établissent des symbioses avec les racines des plantes).

Grâce à des analyses de 13C, ils ont montré que le renforcement des réseaux de connexions entre organismes du sol s’est accompagné d’un transfert accru de carbone vers le sol : dans les sols non cultivés depuis plus longtemps les plantes présentaient moins de carbone provenant de la photosynthèse dans leurs racines alors que les consommateurs, tels que les nématodes et les champignons, contenaient l’essentiel du carbone marqué. Ainsi, les champignons ont incorporé les trois quarts du carbone marqué dans les sols mis en jachère depuis longtemps mais seulement la moitié de celui-ci dans les sols mis en jachère récemment.
Ces modifications n’ont pas été associées à une augmentation de la biomasse fongique mais plutôt à une augmentation de la proportion de groupes microbiens consommateurs de carbone et à une plus grande connexion des organismes entre eux. 

L’ensemble de ces résultats montre que le réseau de connexions entre organismes est renforcé avec le temps de mise en jachère du sol et se traduit par une plus grande incorporation du carbone issu des plantes via en particulier les champignons du sol.

Ces résultats innovants ouvrent des perspectives stimulantes pour la gestion durable des sols promouvant le transfert de carbone vers les sols et en phase avec l’objectif d’augmenter annuellement de 4 p 1000 le stock de carbone des sols. Il apparait ainsi essentiel de mieux connaitre l’écologie des champignons incorporant le carbone dans la chaine trophique du sol et de porter une attention particulière non seulement à la biodiversité des sols mais également aux réseaux d’interactions entre organismes. Les recherches à venir devront en particulier évaluer l’effet de systèmes agroécologiques sur ces champignons et sur ces interactions afin de privilégier les pratiques favorables au stockage du carbone.

 

Réference

Morriën E. et al. Soil networks become more connected and take up more carbon as nature restoration progresses. Nat. Commun.  8, 14349/doi: 10.1038/ncomms14349 (2017).

 

Service Presse INRAE

Contacts

Philippe LemanceauUMR Agroécologie (INRAE, Univ. Bourgogne, AgroSup Dijon, CNRS)

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