Biodiversité 3 min

Un avenir pour nos abeilles et nos apiculteurs

Dans cet ouvrage, les auteurs questionnent les pratiques apicoles et agricoles, l’environnement sanitaire et réglementaire de l’apiculture, les recherches scientifiques en cours, pour mettre en avant les solutions vertueuses permettant d’aider les abeilles à mieux vivre, se nourrir, se reproduire.

Publié le 30 septembre 2020

illustration Un avenir pour nos abeilles et nos apiculteurs
© INRAE

La crise actuelle de l’apiculture est sévère, résultant de causes diverses qui s’additionnent et malheureusement se renforcent les unes les autres. Aujourd’hui, l’heure du simple constat est dépassée. Il devient urgent d’agir collectivement en actionnant tous les leviers possibles pour tenter de surmonter cette crise.

Les abeilles sont malades des pesticides et du varroa, c’est un fait avéré. Mais est-ce une fatalité ?

Le livre détaille les pistes applicables à court ou moyen terme, comme la valorisation des souches d’abeilles locales ou naturellement tolérantes au varroa, l’amélioration de l’évaluation des nouvelles molécules phytosanitaires avant leur mise sur le marché, l’adoption de nouvelles pratiques culturales, ou encore la mise en place de mesures préventives pour empêcher l’arrivée de nouveaux prédateurs ou parasites des abeilles.

Ainsi se dessinent les contours d’une apiculture durable qui sera l’apiculture du futur, si nous voulons continuer l’aventure plurimillénaire qui lie les abeilles mellifères à nous autres humains.

Les auteurs

Entomologiste amateur et ancien attaché au laboratoire d’entomologie du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris, Vincent Albouy s’intéresse depuis près de 30 ans aux insectes communs et à leur protection.

Apiculteur amateur, Yves Le Conte est actuellement directeur de recherche à l’INRAE d’Avignon. Depuis une trentaine d’années, il développe des programmes de recherche sur la communication chimique chez les abeilles, les mécanismes, l’évolution et les perturbations des régulations sociales des colonies, et sur le parasite de l’abeille, Varroa destructor. Son activité s’est plus récemment centrée sur la compréhension des phénomènes responsables du déclin des populations avec une approche physiologique, comportementale, écologique, pathologique et toxicologique.

Editions Quae – coll. Carnets de sciences, 168 pages, septembre 2020 – 22 euros

EXTRAITS

• Si la responsabilité des pratiques de l’agriculture conventionnelle dans la diminution des ressources en nectar et en pollen pour les abeilles mellifères n’est plus à démontrer, qu’en est-il de l’agriculture biologique ? Représente-t-elle une alternative plus intéressante pour l’apiculture ?

Une équipe de l’Inra basée dans le sud des Deux-Sèvres a analysé en 2019 les données issues de six années de mesures bimensuelles dans dix ruchers répartis sur un site de 435 km2. Elle a mis en relation la superficie de couvain d’ouvrières, le nombre d’abeilles adultes et les réserves de miel avec le pourcentage de terres agricoles en agriculture biologique dans les environs des ruches à deux échelles spatiales, 300 m et 1 500 m.

Il est apparu qu’à l’échelle de 300 m, l’agriculture biologique a augmenté la surface de couvain d’ouvrières et le nombre d’abeilles adultes pendant la période située entre les floraisons de colza et de tournesol, qui, dans les terrains en agriculture conventionnelle, correspond à une période de disette. Les chercheurs pensent que les terres en agriculture biologique hébergent durant cette période de pénurie des floraisons plus nombreuses et plus diversifiées, gage d’une meilleure alimentation pour le couvain. La diminution de l’exposition aux pesticides peut aussi avoir amélioré la survie des abeilles.À l’échelle de 1 500 m, l’agriculture biologique a permis d’augmenter les réserves de miel des colonies, toujours pendant cette période de disette et jusqu’au début de la floraison du tournesol. Les réserves de miel ont peut-être surtout bénéficié d’une plus grande disponibilité, à portée de vol, de fleurs mellifères : dans les éléments semi-naturels préservés comme les haies et les bordures en herbe, dans les cultures de couverture mais également parmi les « mauvaises » herbes.

La meilleure survie hivernale des colonies étant liée à l’augmentation de la surface de couvain d’ouvrières, l’agriculture biologique contribuerait à atténuer les répercussions de l’agriculture conventionnelle intensive sur la vitalité des colonies. Toute conversion à l’agriculture biologique dans les environs immédiats de son rucher ne peut être donc qu’un plus pour l’apiculteur, et l’installation d’un rucher au milieu de terres agricoles en culture biologique ne peut que favoriser une meilleure santé des colonies.

• Les viticulteurs prennent conscience de l’intérêt à protéger la biodiversité, et de diminuer, voire éliminer dans la mesure du possible, l’emploi des pesticides. C’est un plus pour leur santé, comme pour leur image publique. La visite des fleurs de vigne par un plus grand nombre de pollinisateurs, même s’il s’agit d’une plante largement pollinisée par le vent, améliore la qualité des grappes en diminuant dans certaines conditions la coulure et le millerandage, deux accidents empêchant le développement normal des grappes. Les apiculteurs bénéficient pour leur part de colonies plus dynamiques car mieux nourries.

Ce travail* en commun a débouché sur un dialogue constructif entre viticulteurs et apiculteurs, avec par exemple une alerte lancée pour fermer les ruches lors des traitements obligatoires contre la flavescence dorée, et même entre viticulteurs eux-mêmes, qui échangent idées, techniques et matériel. La collectivité tout entière y gagne aussi, par un environnement fleuri plus esthétique, mais également par l’amélioration de la qualité de l’eau. Les couverts limitent le ruissellement des eaux de pluie en favorisant leur infiltration, dans un secteur qui est situé sur les deux rives du fleuve Charente et se trouve dans l’emprise d’un captage alimentant les villes de Saintes et Royan.

Quel avenir pour cette opération ? Il semble plutôt favorable. Les viticulteurs partenaires entament une démarche de recherche de qualité qui s’inscrit dans la mutation de la profession. Les grandes maisons de Cognac encouragent en effet les producteurs à obtenir la certification environnementale Cognac, et elles ont donné comme objectif l’arrêt de l’utilisation des herbicides en 2028. Certains viticulteurs ont d’ailleurs anticipé ces directives et déjà arrêté l’utilisation des herbicides chimiques. L’exploitation viticole de l’un des membres de l’association est même certifiée HVE3 (Haute Valeur environnementale).

* Ce projet, ouvert à toute la population, aux agriculteurs et aux apiculteurs, est porté par l'Association Apitivi qu'ils ont créée. Ils se sont regroupés pour implanter des couverts mellifères au milieu du vignoble cognaçais.

 

 

 

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