Biodiversité 4 min

WeTruf, la start-up au service de la trufficulture

Crée en 2019, la startup WeTruf est un véritable couteau suisse au service de la trufficulture : formations, conseil, expertises… et commercialisation d’innovations tout droit sorties des laboratoires d’INRAE. Rencontre avec Flora Todesco, Présidente de WeTruf.

Publié le 12 octobre 2020

illustration WeTruf, la start-up au service de la trufficulture
© WeTruf

La truffe est bien connue pour ravir nos papilles mais elle a aussi des vertus au champ ! Elle ne nécessite aucun intrant (engrais, pesticides), elle favorise la biodiversité et grâce aux innovations de la start-up WeTruf, sa consommation en eau peut être limitée et ajustée en temps réel en fonction de ses besoins. La trufficulture est également un bon moyen pour les agriculteurs de se diversifier et compléter leurs revenus. Malgré ces nombreux atouts, la truffe est une alternative de culture mal connue et  qui nécessite souvent un  accompagnement pour la mettre en place.  

Flora Todesco a travaillé à INRAE, au laboratoire Interactions Arbres-Micro-organismes (IAM) pendant quatre années, aux côtés de Claude Murat, ingénieur de recherche à INRAE dont les travaux portent depuis de nombreuses années sur les truffes. Forts de leurs expertises sur la truffe et sa culture, ils se sont lancés en octobre 2019 dans l’aventure de l’entreprenariat, Flora en tant que Présidente de WeTruf et Claude apportant son concours scientifique. Nous avons posé 3 questions à Flora Todesco, dynamique entrepreneuse.

Comment est née l’idée de la start-up WeTruf et quels sont ses objectifs ?

La truffe, un champignon mychorizien qui vit en association avec les arbres via leurs racines

L’idée de la start-up WeTruf est née dans les laboratoires d’INRAE à Nancy, dans une équipe pluridisciplinaire de biologie et d’écologie qui étudie, parmi d’autres modèles, les truffes, des champignons mychoriziens et symbiotiques vivant en association avec les arbres via leurs racines. La culture des truffes est complexe car leur mode de reproduction n’est pas réalisable en laboratoire. On a ainsi besoin de données sur la biologie du champignon mais aussi de données expérimentales et culturales sur le terrain. Cela fait plus de 40 ans que les truffes sont étudiées dans le laboratoire IAM entre autres par François Le Tacon, Francis Martin et plus récemment Claude Murat. De nombreuses données sur la trufficulture ont été générées et plusieurs innovations ont été développées. En 2019, c’était le bon moment pour créer une entreprise et valoriser ces savoir-faire au service de la filière trufficole.
WeTruf commercialise deux innovations. La première concerne la gestion de l’eau, un point clé dans la culture de la truffe dont l’apport en eau est primordial et mis à mal par les périodes de sécheresse de plus en plus fréquentes. Dans les laboratoires d’INRAE, nous avons développé un prototype d’appareil1 permettant de lire des sondes qui s’insèrent dans le sol, aux pieds des arbres truffiers, et qui mesurent en direct la disponibilité de l’eau dans le sol. WeTruf a ensuite finalisé le développement de l’appareil pour aboutir à un instrument commercialisable : le pF Tracer One TM. Nous mesurons ainsi le potentiel hydrique du sol et lorsque le seuil est atteint en terme de non disponibilité en eau, c’est le signal pour le trufficulteur de la nécessité d’arroser. La deuxième innovation est biomoléculaire. Dans le cadre d’un

Des tests ADN pour identifier les espèces de truffes

programme de recherche entre INRAE, AGRITRUFFE et les pépinières ROBIN un protocole rapide permettant de distinguer en une seule réaction la truffe noire - Tuber melanosporum - , la truffe de Chine - Tuber indicum - et la truffe noire européenne - Tuber brumale - a été mis au point. Ce protocole, permettant de traiter plusieurs milliers d’échantillons en quelques jours, est valorisé par WeTruf sous forme d’une licence sur savoir-faire.
En parallèle de ces deux innovations, nous avons également toute une offre de services qui vient en soutien à la filière trufficole qui malgré un fort potentiel de développement en France et à l’étranger, manque de moyens et ne bénéficie pas pour l’instant d’une interprofession pouvant faire le lien avec la recherche. Ainsi nous proposons des formations, expertises, conseils, aide à la rédaction de projets ou de demande de financements, etc.

 

Quels sont vos liens avec INRAE et quel a été le parcours pour créer votre start-up ? 

Les liens entre INRAE et WeTruf sont très forts ! Déjà parce que les innovations et notre expertise sur la culture des truffes ont été initiées dans les labos INRAE et aussi parce que la collaboration se poursuit toujours. La start-up est hébergée dans les locaux d’INRAE et nous avons une convention pour l’utilisation des laboratoires d’INRAE, un aspect très important pour notre entreprise puisque nous pouvons poursuivre des activités de recherche et développement pour de futurs projets d’innovation. Enfin, notre consultant scientifique, Claude Murat, est toujours ingénieur de recherche INRAE au laboratoire IAM. 
D’une manière plus générale, nous avons toujours été soutenus par INRAE dans notre projet de création d’entreprise. Il a été à la fois approuvé par notre hiérarchie et par les professionnels de la trufficulture car il répondait à un besoin qu’ils avaient clairement exprimé. Nous avons été ensuite « incubés » pendant 7 mois en 2019 à l’Incubateur Lorrain de Nancy, ce qui a permis de mâturer le projet, à la fois dans l’élaboration de l’offre de service, mais aussi dans le développement des innovations car il a fallu entre autres trouver le partenaire industriel pour développer le boitier de mesure du potentiel hydrique. Et en octobre 2019, WeTruf est née ! 

Quels sont vos prochains projets ?

Nous avons deux projets de recherche et développement en cours concernant nos deux licences avec INRAE. Le premier est de développer une deuxième version du boîtier de mesure du potentiel hydrique du sol qui permettra de lire les données en temps réel, de les consulter à distance, d’enregistrer les données et de les visualiser sur une application. Nous travaillons également à améliorer la portabilité du kit de diagnostic moléculaire afin de le rendre encore plus rapide et facile d’utilisation.
Enfin, nous explorons cette année la voie du « e-learning » via un programme de 13 modules de formation en ligne, traitant à la fois des sujets scientifiques et techniques se rapportant à la truffe et la trufficulture.

De belles innovations en perspectives, In truffles we trust !
 

[1] Avec le soutien du labex ARBRE et du département EFPA d'INRAE.

Elodie Regnier Rédactrice

Contacts

Flora Todesco Présidente de WeTruf

Claude Murat Ingénieur de rechercheUMR Intéractions arbres-microorganisme (IAM)

Le centre

Le département

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