Biodiversité 2 min

Transfert de nombreux gènes de plantes vers un insecte ravageur

COMMUNIQUÉ DE PRESSE - L’aleurode du tabac est l’un des principaux insectes ravageurs des cultures des régions tropicales et subtropicales. En étudiant son génome, INRAE et le CNRS ont identifié 49 gènes de plantes que l’insecte a intégrés à son génome. Un nombre aussi surprenant de gènes transférés entre des plantes et un insecte n’avait jamais été détecté. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives de recherche sur les relations entre les plantes et les insectes pour développer des moyens de lutte innovants et réduire l’usage des pesticides.

Publié le 10 octobre 2022

illustration Transfert de nombreux gènes de plantes vers un insecte ravageur
© US Department of Agriculture - Stephen Ausmus

La guerre entre les plantes et les insectes herbivores date de centaines de millions d’années, et a conduit les deux protagonistes à une course à l’armement se traduisant par la mise en places de voies de signalisation et de barrières physiques et chimiques chez les plantes, ainsi que de stratégies de contournement chez les insectes. Mais les gènes permettant l’adaptation des insectes ont parfois une origine inattendue ! De récentes études en 2020 et 2021 ont montré pour la première fois le transfert de 2 gènes de plantes vers le génome de l’aleurode du tabac (Bemisia tabaci) (Lapadula et al., 2020 ; Xia et al., 2021), dont l’un confère notamment à l’aleurode la capacité de neutraliser des toxines de défense produites par les plantes. Intrigués par ce résultat, le scientifique d’INRAE et celui du CNRS ont cherché à savoir combien de gènes provenaient des plantes dans le génome de l’aleurode, qui a été entièrement séquencé en 2016.

49 gènes de plantes dans le génome de l’insecte

 

Grâce à des analyses de bio-informatique, les chercheurs sont parvenus à identifier 49 gènes de plantes dans le génome de l’aleurode, issus d’au moins 24 événements de transfert de gènes indépendants. La majorité de ces gènes présentent des caractéristiques de gènes fonctionnels - c’est-à-dire qu’ils sont exprimés chez l’insecte et que leurs séquences présentent des signes de contraintes évolutives - ayant donc un rôle potentiel chez l’insecte. Leurs résultats montrent également que la plupart des gènes identifiés ont un rôle connu dans les relations entre les plantes et leurs parasites, comme par exemple des gènes permettant de produire des enzymes qui dégradent les parois des cellules végétales. Cela reflète probablement le résultat d’un processus de sélection naturelle de gènes de plantes chez l’insecte, ayant permis à l’aleurode de s’adapter à une large gamme d’espèces végétales. L’origine et les mécanismes de ces transferts restent à découvrir, mais ils datent tous de plusieurs millions d’années.

C’est la première fois que sont identifiés des transferts de gènes entre plantes et insectes en si grand nombre.

 

Cette étude ouvre de nouvelles perspectives de recherche sur les relations entre plantes et insectes ravageurs mais aussi de moyens de lutte en agriculture. Comprendre le rôle des gènes transférés pour les plantes et les insectes pourrait permettre de proposer des moyens de lutte innovants pour réduire l’usage des pesticides grâce à l’amélioration des plantes (sélection variétale).

 

Références

Gilbert C, Maumus F. (2022). Multiple horizontal acquisitions of plant genes in the whitefly Bemisia tabaci. Genome Biology and Evolution, evac141, https://doi.org/10.1093/gbe/evac141

Études de 2020 et 2021

Lapadula W.J., Mascotti M.L., Juri Ayub M. (2020). Whitefly genomes contain ribotoxin coding genes acquired from plants. Sci Rep, 10, 15503. https://doi.org/10.1038/s41598-020-72267-1

Xia J., Guo Z., Yang Z. et al. (24 June 2021). Whitefly hijacks a plant detoxification gene that neutralizes plant toxins. Cell, 184 (13), 3588 https://doi.org/10.1016/j.cell.2021.02.014

CP_Echange_genes_plantes_insectespdf - 735.74 KB

Service Presse INRAE

Contacts scientifiques

Florian Maumus Chercheur INRAEUnité de recherche Génomique-Info

Clément Gilbert chercheur CNRS Laboratoire Évolution, génomes, comportement, écologie

Le centre

Le département

En savoir plus

Alimentation, santé globale

Le génome du charançon des céréales déchiffré : un outil supplémentaire pour lutter contre ce ravageur

COMMUNIQUE DE PRESSE - Un consortium international, impliquant INRAE et l’INSA Lyon, vient de déchiffrer le génome du charançon des céréales : l’insecte ravageur majeur des céréales en champs et en silo dans les pays en développement, est une véritable menace pour leur sécurité alimentaire. L’analyse fine de ce génome montre une abondance de séquences répétées, en potentielle association avec la présence d’une bactérie symbiotique qui assure la survie du charançon. Des résultats parus le 9 novembre dans la revue BMC Biology, qui élargissent le champ des possibles dans la lutte contre ce ravageur.

09 novembre 2021

Agroécologie

A qui perd gagne au cours de l’évolution des espèces à génome complexe ?

COMMUNIQUE DE PRESSE - La perte de gènes dupliqués pourrait-elle servir de moteur à l’évolution au même titre que la duplication de gènes ? En étudiant la reproduction du colza, des chercheurs de l’Inra ont montré que, loin d’être délétère, la perte d’une des copies dupliquées d’un gène essentiel pour réaliser des échanges entre chromosomes au cours de la méiose pourrait conférer un avantage adaptatif. Publiés dans Nature Communications, ces résultats ouvrent des perspectives en amélioration des plantes, notamment pour sélectionner de nouvelles espèces cultivées présentant plusieurs sous-génomes, à l’instar du triticale, un hybride entre le blé et le seigle.

24 décembre 2019

Agroécologie

Agriculture compétitive et durable : les apports croissants du biocontrôle

DOSSIER DE PRESSE - Lancé à l’occasion du Grenelle de l’environnement de 2007, le plan Ecophyto a pour objectif de réduire de 50 % le recours aux produits phytopharmaceutiques en France, à l’horizon 2025. Certaines des substances jugées préoccupantes ont déjà été retirées du marché et d’autres, à l’instar du glyphosate, le seront dans les années à venir. C’est une excellente nouvelle pour l’environnement comme pour notre santé. Mais ça n’est pas sans conséquence pour l’ensemble des filières agricoles.

21 janvier 2020