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La résistance à l'hormone thyroïdienne alpha (RTHα) est détectable par RMN dans le sang et l’urine de la souris

Les mutations du récepteur alpha (TRα) de l'hormone thyroïdienne sont à l’origine d’une résistance à cette hormone. C’est une maladie génétique rare dont le diagnostic est difficile en raison de la grande variabilité des signes cliniques et l'absence de marqueurs biochimiques fiables, jusqu’à présent, La découverte d’une possibilité de diagnostic par analyse RMN de l’urine ou du sang pourrait changer la donne.

Publié le 12 décembre 2019

illustration La résistance à l'hormone thyroïdienne alpha (RTHα) est détectable par RMN dans le sang et l’urine de la souris
© INRAE

La résistance aux hormones thyroïdiennes est héréditaire. Elle se caractérise par l’insensibilité de tissus, normalement réactifs, à une stimulation thyroïdienne. La résistance à l'hormone thyroïdienne alpha (RTHα) est une maladie génétique rare due à des mutations dans le gène THRA, qui code pour le récepteur de l'hormone thyroïdienne alpha 1 (TRα1). On a longtemps cru que les mutations du récepteur alpha (TRα), contrairement à celles du récepteur β, étaient létales, puisque aucun patient n’avait été identifié avec une telle anomalie. En 2012, un premier cas a été rapporté, avec notamment pour symptômes un retard mental modéré, un retard de croissance et un retard de maturation osseuse. Depuis cette première description, 46 cas de RTHα ont été rapportés dans le monde, correspondant à 26 mutations différentes de TRα1. Les patients RTHα partagent certains des symptômes communs aux patients hypothyroïdiens, sans réduction significative du niveau d'hormones thyroïdiennes. La grande variabilité des signes cliniques et l'absence de marqueurs biochimiques fiables rendent le diagnostic de cette maladie difficile.

Des modèles souris aux symptômes proches de ceux des patients humains

Certaines des mutations dans le gène THRA ont récemment été reproduites chez la souris (Markossian et al., 2018). Les chercheurs les ont créées, avec CRISPR-Cas9*, en induisant un décalage du cadre de lecture dans le gène THRA. Ils ont ainsi obtenu quatre modèles murins avec différentes mutations. Deux de ces modèles sont très proches de mutations humaines connues (ThraS1 / + et ThraS2 / +), tandis que les deux autres (ThraL1 / +, ThraL2 / +)  n'ont pas encore été décrites chez des patients. Une analyse phénotypique approfondie (Markossian et al., 2018) a montré que les souris ThraS1 / + et ThraS2 / + présentent plusieurs profils de développement observés chez les patients RTH, tandis que les souris ThraL1 / + etThraL2 / + ont un phénotype presque normal. L’urine des souris a été prélevée à deux âges différents (trois et six mois) et le sang à six mois.

Les phénotypes métaboliques des échantillons d'urine et de plasma prélevés chez ces quatre modèles animaux ont été analysés en utilisant une approche métabolomique basée sur la résonance magnétique nucléaire (RMN) non ciblée**.

Une mutation détectable par RMN dans l’urine et le plasma

 

L'analyse statistique des profils métabolomiques des échantillons d'urine et de plasma a montré que :

  1. Les biofluides de souris porteuses de mutations de type humain (ThraS1 / + et ThraS2 / +) peuvent être différenciés de l’autre type de mutation (ThraL1 / +, ThraL2 / +) et des témoins sains (souris de phénotype « sauvage »).
  2. La méthode ne permet pas de discriminer l’autre type de mutation (ThraL1 / +, ThraL2 / +), qui a peu de conséquences sur le développement et la physiologie, et n'a jamais été rapportée chez l'homme.
  3. Les signatures métaboliques associées aux mutations Thra dans l'urine et le plasma diffèrent nettement de l'empreinte métabolique de l'hypothyroïdie, provoquée expérimentalement dans cette étude, chez la souris.
  4. Les signatures métaboliques sont stables dans le temps.

Ces résultats démontrent que la RMN pourrait être utilisée pour diagnostiquer la résistance à l'hormone thyroïdienne alpha chez l’humain, grâce à la détection des empreintes métaboliques présentes dans les biofluides.

 

*CRISPR (ou CRISPR-Cas9) désigne un ensemble de molécules qui permettent de modifier l'ADN de plantes et d'animaux avec une grande précision.

**La méthode ne cible pas un seul métabolite, dont la présence dans l'urine ou le plasma serait le signe distinctif de RTHα, mais elle est basée sur l’analyse simultanée des concentrations d’un grand nombre de métabolites.

 

Références

Boumaza, H.; Markossian, S.; Busi, B.; Rautureau, G.J.P.; Gauthier, K.; Elena-Herrmann, B.; Flamant, F., Early Access 2019. Metabolomic Profiling of Body Fluids in Mouse Models Demonstrates that Nuclear Magnetic Resonance Is a Putative Diagnostic Tool for the Presence of Thyroid Hormone Receptor alpha 1 Mutations. Thyroid . 29, http://dx.doi.org/10.1089/thy.2018.0730

Autre référence citée dans l'article

Markossian, S.; Guyot, R.; Richard, S.; Teixeira, M.; Aguilera, N.; Bouchet, M.; Plateroti, M.; Guan, W.Y.; Gauthier, K.; Aubert, D.; Flamant, F., 2018. CRISPR/Cas9 Editing of the Mouse Thra Gene Produces Models with Variable Resistance to Thyroid Hormone. Thyroid. 28:139–150  http://dx.doi.org/10.1089/thy.2017.0389

 

Sylvie Andrérédactrice

Contacts

Frédéric Flamant Contact scientifiqueUSC Institut de Génomique Fonctionnelle de Lyon (IGFL)

Le département

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