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Quand une bactérie répare son ADN endommagé pour s’adapter à son environnement

L’ADN est soumis à de nombreuses contraintes physico-chimiques d’origine intra- ou extra-cellulaire, qui entraînent l’apparition régulières de lésions, y-compris des cassures de l’ADN. Face à cela les bactéries développent des stratégies de réparation qui peuvent avoir des conséquences surprenantes sur la capacité d’adaptation des bactéries à leur environnement. C’est ce que des chercheurs du Laboratoire des Interactions-Plantes-Microorganismes, LIPM (INRAE-CNRS) ont montré dans un article paru le 04 décembre 2018 dans la revue Nucleic Acids Research.

Publié le 25 février 2019

illustration Quand une bactérie répare son ADN endommagé pour s’adapter à son environnement
© INRAE

L’ADN (acide désoxyribonucléique), macromolécule biologique constitutive des chromosomes, est formée de l’enchaînement linéaire de plusieurs millions/milliards de nucléotides dont la nature et l’ordre bien précis déterminent l’information génétique des êtres vivants. Maintenir l’intégrité de cette molécule est donc une priorité des êtres vivants pour assurer l’expression et la transmission fidèle de leur patrimoine génétique. A l’échelle d’une cellule, la moindre cassure chromosomique, si elle n’est pas réparée, peut avoir des conséquences irréversibles, dont la mort de la cellule.

Comment une bactérie s’adapte-t-elle à son environnement ?

Les êtres vivants ont donc développé des mécanismes de réparation des cassures de l’ADN, dont l’un d’eux, appelé NHEJ (pour Non-Homologous End-Joining) consiste à rapprocher et « recoller » les extrémités d’ADN, restaurant ainsi l’intégrité de la molécule.

A la différence d’autres mécanismes de réparation plus fidèles, le NHEJ répare les chromosomes au prix parfois de « bricolages » au niveau de la jonction de réparation, qui peuvent aboutir à une modification de la composition locale en nucléotides et donc parfois à un changement du sens de l’information génétique (on parle de mutations).

Une réparatrice d’ADN hors pair

En étudiant le mécanisme de réparation NHEJ chez une bactérie du sol,Sinorhizobium meliloti, deux observations surprenantes ont été réalisées :

  • La capacité des bactéries à réparer les cassures par NHEJ augmente en conditions environnementales stressantes, comme par exemple lors d’une élévation de la température ambiante.
  • D’autre part, parmi les « bricolages » du système de réparation NHEJ, il peut lui arriver d’intégrer accidentellement un fragment d’ADN d’origine étrangère au niveau de la cassure réparée.

Ces observations réalisées en laboratoire pourraient trouver un écho dans la nature : lorsque les bactéries se trouvent en conditions environnementales défavorables, l’augmentation de leur capacité de réparation de l’ADN par NHEJ entraînerait une augmentation de la fréquence d’apparition de mutations dans leur génome. De plus, la stimulation de leur capacité à intégrer de l’ADN étranger leur permettrait d’acquérir plus facilement de l’information génétique en provenance d’autres organismes (on parle de « transfert horizontal de gènes »).

Ces mécanismes, présents chez de nombreuses espèces bactériennes, pourraient ainsi leur permettre d’augmenter leur potentiel d’évolution génétique, et donc leur faculté d’adaptation à de nouvelles conditions environnementales.

Ce travail a été réalisé au sein du Laboratoire des Interactions Plantes-Microorganismes (LIPM), et a été soutenu par INRAE au travers d’un contrat jeune scientifique à Pierre Dupuy, et d’un financement du Département Santé des Plantes et Environnement.

Référence de la publication

Dupuy, P., Sauviac, L., and Bruand, C. Stress-inducible NHEJ in bacteria: function in DNA repair and acquisition of heterologous DNA. Nucleic Acids Research, 2018 Dec 4. https://doi.org/10.1093/nar/gky1212

 

Contacts

Claude BRUAND Directeur d'unitéLaboratoire des Interactions Plantes Micro organismes (LIPM)

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