Agroécologie 6 min

Productivité laitière et émissions de gaz à effet de serre d’élevages bovins caractérisés par des systèmes fourragers « hors normes »

Les éleveurs bovins laitiers ayant recours à de grandes quantités d’herbe dans les rations produisent moins de lait (- 30 %), mais produisent également moins de gaz à effet de serre (- 20 %).

Publié le 08 septembre 2022

illustration Productivité laitière et émissions de gaz à effet de serre d’élevages bovins caractérisés par des systèmes fourragers « hors normes »
© Sophie Normant

Les éleveurs de bovins laitiers mettent en œuvre une grande diversité de pratiques qui ont des conséquences sur les performances économiques (production de lait) et environnementales (émissions de gaz à effet de serre). Cette diversité de pratiques concerne, entre autres, la production de fourrages et la stratégie d’alimentation des animaux.
Beaucoup d’études se focalisent sur des systèmes agricoles avec des caractéristiques « moyennes » pour généraliser les résultats à l’ensemble des systèmes existants. Cependant, ce type d’approche ne tient pas compte des systèmes atypiques, dont les impacts environnementaux peuvent être particulièrement élevés (par exemple, à un manque d’efficacité) ou au contraire particulièrement faibles (par exemple, à des techniques innovantes).
Il y a donc un intérêt de se focaliser sur des fermes « atypiques », dont les caractéristiques s’écartent de la moyenne.

Les chercheurs de l’UMR SAS ont appliqué à trois régions françaises la théorie des valeurs extrêmes (TVE) comme méthode statistique, avec l’objectif d’identifier les fermes laitières avec des productions de fourrages qui peuvent être considérées comme atypiques par rapport aux systèmes dominants.

La méthode a été appliquée sur un échantillon de 96 fermes laitières de Normandie, 140 de Lorraine et 154 du Nord-Pas-de-Calais. Cette méthode a permis d'identifier des sous-échantillons de 10 à 30 % d'exploitations laitières ayant le recours le plus élevé ou le plus faible au pâturage ou à l'ensilage de maïs dans chaque région. Les émissions de GES et la productivité laitière ont été évaluées dans ces groupes de fermes jugées extrêmes en termes de système fourrager.

Des stratégies régionales

Les caractéristiques des exploitations identifiées comme extrêmes différaient d'une région à l'autre en raison de l'influence de la géographie et du climat. Les systèmes fourragers basés sur les plus grandes quantités d'herbe et les plus petites quantités d'ensilage de maïs correspondaient à des troupeaux composés de races de vaches variées en Normandie et en Lorraine, mais uniquement des vaches Prim’Holstein dans le Nord-Pas-de-Calais. Par contre, les systèmes fourragers basés sur les plus petites quantités d'herbe et les plus grandes quantités d'ensilage de maïs correspondaient à des troupeaux composés uniquement de vaches Prim’Holstein, quelle que soit la région. Les systèmes fourragers extrêmes se retrouvaient davantage dans des exploitations orientées vers la production d'un lait plus riche en matières grasses et en protéines en Normandie et en Lorraine, alors qu’elles étaient plutôt orientées vers la production de plus grandes quantités de lait dans le Nord-Pas-de-Calais.

aux conséquences économiques et environnementales différentes

La quantité d’herbe ou d’ensilage caractérisant ces systèmes fourragers extrêmes est apparue significativement corrélée à la quantité de lait produite et au niveau des émissions de GES et de méthane entérique (CH4) par exploitation. Plus précisément, la quantité de lait produite par vache est apparue corrélée positivement aux émissions de GES et non la quantité d’herbe dans la ration.
Par exemple, l’augmentation extrême entre systèmes fourragers de 1314 à 5093 kg MS d’herbe/animal (vache ou génisse) /an conduit à une réduction de 30% de la production laitière (8236 vs 5834 l), de 20 % des GES (7117 vs. 5587) et 15% du CH4 entérique (3870 vs. 3296).

En conclusion, les fermes caractérisées par un système fourrager très herbager avec des troupeaux plutôt multi-races produisent moins de lait, mais émettent en même temps moins de gaz à effet de serre. Les perspectives sont de mesurer les performances économiques de ces élevages « hors normes » en termes de systèmes fourragers et d’évaluer leur sensibilité aux aléas (vulnérabilité).

En savoir plus

Agroécologie

« Des graines pour nourrir l’avenir » : retour sur la journée technique PSDR dédiée aux légumineuses

Jeudi 16 janvier, le PSDR (Programme de Recherche pour et sur le développement régional) Bourgogne-Franche-Comté a organisé au Lycée agricole de Quétigny (21), une journée de valorisation de ses travaux sur les légumineuses, une famille de plantes qui ont leur rôle à jouer dans la lutte contre le changement climatique et la réduction de l’utilisation des intrants de synthèse.

21 janvier 2020

Société et territoires

L’Inra et l’Institut de l’Élevage créent une Unité mixte technologique sur l’élevage des chèvres : « Systèmes caprins durables de demain »

COMMUNIQUE DE PRESSE - Afin d’imaginer des solutions innovantes pour élever les chèvres durablement, l’Inra et l’Institut de l’Élevage (Idele) créent ensemble l’UMT Systèmes caprins durables de demain (SC3D). Cette unité conduira un programme de recherche et développement sur 5 ans. Dans un contexte de changement climatique, ce programme vise à fournir aux éleveurs de chèvres et à la filière caprine, des clés pour aller vers des conduites et des systèmes durables et plus résilients aux aléas.

27 décembre 2019

Agroécologie

Mieux comprendre la biologie du soja pour développer sa culture en France et en Europe

Pour gagner en autonomie protéique, l’Europe travaille à développer sa production de soja. Mettre en place de nouvelles stratégies culturales demande de mieux comprendre la biologie de cette culture et d’élargir la gamme de maturité des variétés. C’est ce que montre une étude menée par des scientifiques du laboratoire Agroécologie Innovation et Territoires d’INRAE Occitanie-Toulouse en collaboration avec l’Université de Washington aux Etats-Unis et Toulouse INP-ENSAT. Leurs résultats sont parus le 29 janvier 2020 dans Frontiers in Plant Science.

01 avril 2020