Changement climatique et risques 3 min

Orienter la génétique aujourd’hui pour préparer les prairies de demain

Dans vingt ans, sous un climat modifié, quelles espèces et variétés les éleveurs devront-ils semer dans leurs prairies ? Le projet CLIMAGIE a étudié la question afin d’aiguiller les recherches des semenciers. Avec un double objectif : produire en quantité et en qualité pour nourrir les animaux et réduire les impacts environnementaux.

Publié le 11 janvier 2018

illustration Orienter la génétique aujourd’hui pour préparer les prairies de demain
© INRAE, J-L Durand

« La diversité génétique au sein des espèces et la diversification des espèces semées constituent les principaux leviers pour préparer les prairies à faire face au changement climatique », souligne Jean-Louis Durand, porteur du projet CLIMAGIE - Adaptation des prairies au changement climatique : amélioration génétique et intensification écologique.
Dans 20 à 30 ans, les températures seront plus élevées et la pluviométrie sera plus intense en hiver et réduite en été. « La sélection doit donc entre autres s’orienter vers des variétés qui produisent davantage durant l’été, pour la zone tempérée, et durant l’automne et l’hiver, pour la zone méditerranéenne », précise le chercheur.
Le projet vise à analyser les leviers génétiques à utiliser pour adapter les prairies au changement climatique. Et ce, tout en réduisant l’usage d’intrants agricoles, pesticides et engrais, et les émissions de gaz à effet de serre.

Mieux connaître les plantes fourragères

Le projet CLIMAGIE a structuré un réseau d’équipes d’écologistes, d’écophysiologistes, de sélectionneurs et de généticiens d'INRAE, répartis sur Caen, Lusignan, Clermont-Ferrand, Toulouse et Montpellier. Tous ont travaillé, durant quatre ans, à accroître les connaissances sur les principales espèces et variétés semées dans les prairies : fétuque élevée, dactyle, ray-grass, trèfle blanc et luzerne. Au total, dix expérimentations ont été menées, au champ, en serre ou en conditions contrôlées, en faisant varier la température et les apports d’eau. « L’objectif est de mieux connaître les plantes afin de fournir rapidement des éléments aux sélectionneurs de variétés », explique Jean-Louis Durand. Les chercheurs ont collaboré avec des obtenteurs privés et des éleveurs qui sélectionnent des semences paysannes.

Projet CLIMAGIE cartes déficit hydrique prairies
Les simulations climatiques de Météo France montrent que les déficits hydriques sur la période mai-septembre risquent de se renforcer dans les années futures. De plus en plus d’éleveurs (zones inférieures à - 450 mm) devraient associer dans leurs prairies des variétés tempérées de graminées fourragères à des variétés méditerranéennes.

Diversifier, c’est gagner

Parmi les résultats de recherche obtenus, figure l’intérêt des mélanges d’espèces, d’une part, et de variétés au sein d’une même espèce, d’autre part. « Mélanger des variétés qui n’ont pas besoin d’eau aux mêmes moments est intéressant pour obtenir davantage de stabilité des rendements de la prairie sur l’année », précise le porteur de projet.  
Semer un mélange associant des légumineuses, luzerne ou trèfle, à des graminées présente également un avantage puisque les légumineuses, qui fixent l’azote de l’air, évitent l’apport d’engrais azoté. « La difficulté est de trouver un équilibre dans la durée entre les espèces et variétés du mélange, ajoute le chercheur. Les graminées, par exemple, couvrent rapidement le sol, ce qui permet de limiter le développement de mauvaises herbes et l’utilisation d’herbicides. Mais elles ne doivent pas étouffer les légumineuses. »
Un autre projet de recherche d'INRAE (P3F) se penche actuellement sur les critères d’amélioration des plantes à prendre en compte pour les mélanges en céréales. « L’objectif est de fournir aux éleveurs des mélanges officiellement évalués. »

Dormantes, mais productives

Plusieurs projets de recherche émanent de CLIMAGIE. Parmi eux figure DAC2024 sur la sélection de plantes fourragères destinées à la zone méditerranéenne. « Dans cette zone, les plantes ne doivent absolument pas pousser au cours de l’été, sinon elles meurent, faute d’eau, explique Jean-Louis Durand. CLIMAGIE a démontré que les plantes présentant une dormance durant l’été n’étaient pas moins productives et se montraient donc très intéressantes pour la zone méditerranéenne. La dormance fait désormais partie des critères de sélection chez les obtenteurs. »

Références :

- KALLIDA R.., ZHOURI L., VOLAIRE F., GUERIN A., JULIER B., SHAIMI N., FAKIRI M., BARRE P. (2016) Combining drought survival via summer dormancy and annual biomass productivity in Dactylis glomerata L. Frontiers in Plant Sciences. doi: 10.3389/fpls.2016.00082
- PRIETO, I., VIOLLE, C., BARRE, P., DURAND, J. L., GHESQUIERE, M., LITRICO, I. 2015. Complementary effects of species and genetic diversity on productivity and stability of sown grasslands. Nature Plants, 1 (4), 1-5. DOI : 10.1038/NPLANTS.2015.33.

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