Bioéconomie

Nouveaux emballages alimentaires à base de déchets agro-industriels

Le projet Ecobiocap a permis de produire des emballages dont les constituants sont exclusivement issus de déchets et sous-produits des industries alimentaires. Durables, adaptés aux denrées périssables, leurs propriétés ont été modulées selon les exigences des aliments. Ecobiocap pose aussi les jalons pour valoriser plus largement ces « déchets-matières premières ».

Publié le 23 mai 2016

illustration Nouveaux emballages alimentaires à base de déchets agro-industriels
© INRAE

Les déchets organiques : une richesse au service de l’économie circulaire

En France, l’industrie agro-alimentaire produit 93 % des déchets organiques industriels. En 2008 (1), ces volumes représentaient 805 000 tonnes de résidus organiques composés de déchets (e.g. parties non valorisées des légumes), de co-produits (e.g tourteaux…) et 2,7 millions de tonnes de boues/effluents. Que faire de tous ces déchets ? Une approche innovante consiste à  les  considérer comme de véritables matières premières attractives (coût, disponibilité, biodégradabilité…). Le projet Ecobiocap (2) s’est attaché à montrer qu’elles pouvaient être valorisées après transformation en matériaux d’emballage alimentaire du type film ou  barquette composite.

Ecobiocap : un programme pionnier pour une nouvelle génération d’emballages

Parmi les nombreux résultats du projet, Ecobiocap a permis de fabriquer à une échelle semi- industrielle des barquettes alimentaires composites constituées d’une matrice biopolyester et de charges de renfort : des fibres courtes inférieures à 1mm dispersées de façon homogène au sein de la  matrice.
Des effluents industriels : eaux de lavages d’huileries d’olives, lactosérum fromager, … ont été employés comme substrat de fermentation pour la production de biopolyesters microbiens appelés Poly-hydroxy-alcanoates ou PHA. Des sous-produits ligno-cellulosiques comme les pailles de blé soumis à une combinaison de procédés de fractionnement par voie sèche ont servi à la production de charges de renfort de taille micrométrique. En combinant des technologies de structuration à différentes échelles, les biopolyesters et la charge ligno-cellulosique sont associés pour produire après injection/moulage des barquettes adaptées au conditionnement d’aliments frais (fruits, légumes, fromages fermentés, sandwichs).

Les propriétés barrière de cette barquette peuvent être modulées en jouant sur la fraction massique et la morphologie de la charge de renfort permettant de répondre aux besoins spécifiques des différents produits alimentaires.

Les propriétés mécaniques peuvent être améliorées en jouant sur l’adhésion interfaciale fibre/matrice ou bien en ajoutant un adhésif biosourcé par exemple à base de zéine ou de pullulane.

La sécurité sanitaire de ces barquettes a été testée i.e. la persistance des résidus phytosanitaires dans l’emballage, i.e. leur migration dans l’aliment, i.e. l’emploi en conditions extrêmes de l’emballage. Il s’est avéré que les procédés successifs de traitement permettent de réduire la concentration en contaminants classiques respectivement contenus dans la paille (épiconazole) ou le lactosérum (β hexachlorocyclohexane), mettant hors de danger la santé du consommateur.

Enfin le volet environnemental a été abordé  via une étude d’écotoxicité des emballages et l’Analyse des Cycles de Vie (ACV) appliquée à l’étape de production du PHA et la fabrication d’un ensemble barquette/ film type cellophane pour l’emballage de fraises.

Des retombées d’intérêt pour les industriels de différentes filières

Concrètement, ce vaste projet a permis de mettre au point des procédures d’analyse, de tester à différentes échelles des technologies innovantes, de développer un outil d’aide à la décision. Ces apports intéresseront les industriels de secteurs variés (emballage, gestion et  valorisation des déchets/effluents de nature organique, concepteurs d’agro-matériaux pour divers secteurs applicatifs, bureaux d’étude en environnement…). Le projet a notamment permis de développer :  

  • Un outil d’aide à la décision pour choisir un matériau d’emballage en fonction du type d’aliment. Cet outil devrait être disponible à moyen terme à destination des industriels,
  • Une technologie pilote de conversion d’effluents graisseux et laitiers en PHA intégrant (si nécessaire) une étape de dé-phénolisation,  
  • Des charges de renfort issues de résidus ligno-cellulosiques (paille de blé, grignons d’olives, déchets brassicoles…) obtenues après emploi de procédés combinés de fractionnement par voie sèche,
  • Des séries prototypes d’un emballage alimentaire biodégradable issu à 100 % de résidus alimentaires et adapté à la conservation de produits frais alimentaires testé en conditions réelles jusqu’au consommateur,
  • Des procédures méthodologiques adaptées à l’analyse de l’innocuité de ces matériaux pour l’homme et l’environnement.

(1) Source : AGRESTE  PRIMEUR – N°245 – Juillet 2010 – Déchets des Industries agro-alimentaires.

(2) Projet Ecobioccap : ECOefficient BIOdegradable Composite Advanced Packaging, 2011-2015. Partenaires : 4 Instituts de recherche nationaux : INRAE (Fr), CSIC (Esp), SIK (Swe), Fraunhofer IVV (Deu), 5 universités : Minho (Prt), Rome – La Sapienza & Bologne (Ita), Cork (Irl), Industriels : IBET (Prt), NBM (Esp), CBHU (Hun),  Novamont (Ita), FürstPlast (Fr), Le Fédou (Fr), Alterbio (Fr).

Anne FrinaultRédactrice

Contacts

Nathalie GontardCoordinatrice du projet EcobiocapUMR IATE (Ingénierie des Agro-polymères et Technologies Émergentes) INRAE-Cirad-Université Montpellier2-Montpellier SupAgro

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