Alimentation, santé globale 5 min

Les métabolites produits par le microbiote intestinal : une nouvelle cible pour faciliter la transition alimentaire du sevrage

Les métabolites* produits par le microbiote intestinal au début de l'ingestion d'aliments solides contribuent à la maturation de la barrière intestinale** des jeunes animaux. Ils représentent ainsi une nouvelle cible pour des approches nutritionnelles visant à l’amélioration de la santé digestive.

Publié le 08 septembre 2020

illustration Les métabolites produits par le microbiote intestinal : une nouvelle cible pour faciliter la transition alimentaire du sevrage
© Martin Beaumont

Chez les mammifères, la transition alimentaire du sevrage est associée à des changements importants dans l'intestin. En effet, le passage de l'alimentation par le lait maternel à l'alimentation solide induit un profond remodelage de la composition du microbiote intestinal, principalement caractérisé par une augmentation de la diversité et un déclin de certaines bactéries au profit d’autres, plus adaptées au nouvel environnement. Associées à des facteurs nutritionnels, ces modifications du microbiote contribuent à l'ontogenèse*** intestinale, c’est à dire la formation et la maturation de la barrière intestinale.
Pour le moment, les mécanismes qui sous-tendent la régulation microbienne du développement intestinal lors du passage à l’alimentation solide ne sont pas pleinement compris.
Les chercheurs de l’unité GenPhySE ont étudié comment l'introduction de l'alimentation solide remodèle la composition du microbiote intestinal, son activité métabolique et comment ces changements contribuent à la maturation de la barrière intestinale.
Ils ont donc observé la co-maturation du microbiote (composition et activité métabolique) et de la muqueuse intestinale lors de la transition de l’allaitement à l’ingestion d’aliments solides en utilisant une combinaison d'expériences in vivo (avec un modèle lapin), ex vivo (avec des chambres d'Ussing, appareil permettant de  mesurer la perméabilité intestinale) et in vitro (avec des lignées de cellules épithéliales et d’organoïdes**** de lapin en culture).

La composition et l'activité métabolique du microbiote intestinal sont modifiées drastiquement dès le début de l'ingestion d'aliments solides

L’introduction d'aliments solides dans le régime alimentaire induit un changement majeur dans la composition du microbiote intestinal des lapereaux, tandis que l'augmentation ultérieure de la quantité d'aliments solides ingérés a des effets plus limités. De la même manière, la production de métabolites bactériens (étudié par analyse du métabolome caecal) est fortement  modifiée dès le début de l’alimentation solide.

La barrière épithéliale est également modifiée au début de cette transition alimentaire

L’analyse du transcriptome de la muqueuse caecale montre que l'expression des gènes impliqués dans la mise en place de la fonction barrière de l’intestin est fortement modifiée lors du passage de l'allaitement maternel à l'alimentation solide. Ces modifications coïncident avec une diminution de la perméabilité de la muqueuse (mesurée ex vivo avec des chambres de Ussing).

Les métabolites bactériens produits par le microbiote intestinal au début de l'ingestion d'aliments solides induisent la maturation de la barrière épithéliale in vitro

Pour vérifier l’hypothèse selon laquelle l'altération de la production des métabolites bactériens pourrait agir comme un signal régulant la barrière épithéliale, le surnageant stérile du contenu caecal (contenant un mélange de métabolites) a été prélevé puis mis, in vitro, en présence de cellules Caco-2, une lignée de cellules épithéliales intestinales humaines.

L’analyse du transcriptome de ces cellules montre que les métabolites présents dans le cæcum après l'ingestion d'aliments solides favorisent la formation de la barrière épithéliale par rapport aux métabolites présents dans le cæcum des lapins exclusivement nourris au lait, et que parmi ces métabolites, le butyrate induit l’effet le plus important.

Enfin, les expériences in vitro sur les organoïdes de caecum de lapin montrent que les changements dans l'environnement luminal (de la lumière de l’intestin) consécutifs à l'introduction d'aliments solides induisent une modification de l'expression des gènes dans les cellules épithéliales. Certaines de ces modifications transcriptomiques confirment les observations in vivo, appuyant l’idée que les métabolites du cæcum contribuent à la maturation de la barrière intestinale dès le début de l'ingestion d'aliments solides, au moment de la transition alimentaire du sevrage des jeunes.

Organoïde de caecum de lapin observé au microscope confocal. Les organoïdes sont formés d’une monocouche de cellules épithéliales. Les noyaux des cellules sont visibles en bleu. Le cytosquelette (actine) est visible en rouge.

Contrôler l'activité métabolique du microbiote intestinal en mettant au point une stratégie nutritionnelle adaptée pendant cette période clé du développement pourrait constituer une solution prometteuse pour renforcer la santé digestive du jeune animal.

* Un métabolite est un composé organique intermédiaire ou issu du métabolisme. On réserve ce terme en général aux petites molécules et aux monomères, par opposition aux macromolécules
**La notion de  barrière intestinale fait référence à la propriété de la muqueuse intestinale qui consiste à confiner le contenu luminal indésirable dans l'intestin, tout en préservant la capacité d'absorber les nutriments.
***L'ontogenèse décrit le développement progressif d'un organisme depuis sa conception jusqu'à sa forme mûre, voire jusqu'à sa mort.
****
un organoïde est une structure multicellulaire tridimensionnelle qui reproduit in vitro la micro-anatomie d'un organe ; c'est donc un modèle de l'organe.

 

Sylvie André

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