Société et territoires Temps de lecture 3 min
Favoriser les pratiques de gestion améliorant le rôle de puits de carbone des forêts européennes
COMMUNIQUÉ DE PRESSE - Le rapport « Carbon farming in the european forestry sector », piloté par l’Institut forestier européen (EFI) avec la collaboration pour la France d’INRAE et AgroParisTech, montre comment les pratiques de carbon farming peuvent accroître les capacités de puits de carbone des forêts européennes pour aider l’Union européenne à atteindre son objectif de neutralité carbone d’ici 2050. Le boisement, c’est-à-dire la (re)plantation et la régénération des forêts, serait une des méthodes les plus efficaces pour séquestrer du carbone. L’analyse de la gestion forestière montre que les propriétaires privés, qui possèdent plus de 50 % de la forêt européenne, doivent être incités financièrement à donner la priorité à la résilience à long terme des forêts plutôt qu’à des gains à court terme comme l’exploitation forestière intensive. Parmi les nouveaux mécanismes de financement, les crédits carbone temporels seraient la meilleure incitation pour ces propriétaires.
Publié le 17 octobre 2024

Les forêts restent le meilleur moyen naturel de réduire les émissions de CO2, mais elles sont de plus en plus menacées par les incendies, les sécheresses et les tempêtes dans un contexte de changement climatique. Actuellement, la plupart des forêts européennes sont gérées pour la production de bois, les gains en matière de séquestration du carbone étant considérés comme des bénéfices supplémentaires à court terme, plutôt que de miser sur la santé et la résilience à long terme.
La gestion des forêts en Europe nécessite une approche durable et à long terme. Le rapport « Carbon farming in the european forestry sector » détaille comment intégrer au mieux le carbon farming - un ensemble de pratiques qui permettent de capturer et stocker le carbone dans le sol et les plantes - dans la gestion forestière pour maximiser son potentiel d’atténuation et réduire le risque croissant d'incendies de forêt.
Dévoilé aux membres du Parlement européen, à la Commission européenne et aux ministères nationaux du continent lors de l'événement ThinkForest de l'EFI, le rapport montre comment les forêts de l'Union européenne, qui couvrent 40 % de sa surface, peuvent accroître leur capacité en tant que puits de carbone à long terme et aider l'Union à atteindre son objectif de neutralité carbone d'ici 2050.
Introduire une forme de crédits carbone temporels pour les propriétaires privés
Près de la moitié des forêts européennes appartenant à des propriétaires privés, ces derniers doivent être davantage incités à donner la priorité à la gestion à long terme. L'introduction d'une forme de crédits carbone temporels - qui tiennent compte de la nature temporaire du stockage du carbone dans les écosystèmes naturels et sont remesurés chaque année - pourrait fournir aux propriétaires le capital nécessaire pour abandonner les pratiques qui permettent des gains financiers rapides mais dégradent l'environnement, telles que l'exploitation forestière intensive ou le défrichement. En effet le stockage de carbone fondé sur des processus naturels n’est pas permanent. En offrant des crédits carbone temporels par année de stockage de carbone plutôt que des paiements initiaux ou sur une durée correspondant à plusieurs années, cela garantirait que le crédit représente précisément la quantité de carbone séquestrée. La flexibilité et la récurrence des crédits carbone temporels renforceraient ainsi la confiance et la transparence parmi les acheteurs du marché du carbone.
Le rapport suggère également que les crédits carbone temporels soient utilisés comme une contribution financière à l'action climatique plutôt que comme une mesure de compensation. Il recommande le développement de la surveillance géospatiale et de la vérification par des tiers afin de s'assurer que les crédits carbone générés par les projets de carbon farming forestiers reflètent réellement leurs bénéfices pour le climat.
Enfin, le boisement, c’est-à-dire la (re)plantation et la régénération des forêts, est la méthode la plus efficace pour stocker davantage de carbone à long terme. La diversification des essences, l'allongement des durées de rotation et entre les récoltes, l'agroforesterie et la gestion des zones humides sont également considérés comme des méthodes importantes pour inverser les effets des pratiques non durables d'utilisation des sols.
Pour que l'UE puisse exploiter pleinement le potentiel de ses forêts en matière de séquestration du carbone et d'atténuation des risques climatiques, le rapport invite les décideurs politiques à revoir les cadres permettant de mettre en place des mesures efficaces en matière de carbon farming. L'alignement des politiques pour garantir la résilience face aux menaces climatiques devrait aider l'UE à atteindre la neutralité climatique en 2050.
À propos du rapport « Carbon Farming in The European Forestry Sector »
Le rapport est basé sur une analyse de la littérature scientifique évaluée par les pairs. La recherche s'est principalement limitée aux publications des 10 dernières années (2013-2023). La portée géographique couvre l'UE-27 et la Norvège pour représenter les forêts boréales, tempérées et méditerranéennes. L'examen a porté sur un total de 118 publications, concernant 349 études de cas et faisant état de changements dans le carbone organique aérien (83) et/ou dans le carbone organique du sol (72). Pour chaque étude, le taux de séquestration du carbone des pratiques de gestion sélectionnées a été tiré directement de l'étude ou estimé en calculant la quantité de réduction des émissions et/ou de réduction du carbone attribuée à une activité de gestion forestière spécifique par rapport à un scénario de maintien du statu quo (base de référence).
Chtiti T., Rey A. (coord.) (2024). Carbon Farming in The European Forestry Sector, European forest institute (EFI) https://doi.org/10.36333/fs17