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Des experts scientifiques internationaux évaluent le déclin des pollinisateurs dans le monde
Une collecte et une analyse d’études scientifiques, réalisées par la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, permet d’établir une situation globale des menaces agro-alimentaires liées au déclin des pollinisateurs dans le monde.
Publié le 11 mai 2022
Une expertise internationale sur les populations de pollinisateurs dans le monde
Que deviendraient nos ressources alimentaires sans pollinisateurs ? Le constat de leur déclin est bel et bien présent à l’échelle mondiale, mais la situation et les actions nécessaires dans les différentes régions du monde sont moins claires. Pour comprendre quelles stratégies appliquer pour assurer leur sauvegarde, en prenant en compte des variances pour chaque région du monde, des scientifiques ont utilisé lors d'une réunion organisée par l'IPBES (plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) et la CDB (Convention sur la Diversité Biologique) la méthode DELPHI afin d’organiser la consultation d’experts internationaux et d’apporter un éclairage et une aide à la décision. Ce groupe de chercheurs, dont Adam Vanbergen (directeur adjoint de l’unité INRAE Agroécologie) fait partie, a évalué l'état actuel des populations de pollinisateurs dans différentes régions du monde. Les menaces auxquelles elles sont confrontées et les impacts sur les bénéfices qu'elles procurent à l'humanité ont ainsi été évalués.
Des raisons multiples identifiées : de l’agriculture intensive au changement climatique
Cette évaluation fait suite à une précédente analyse de l’IPBES (2016), qui a étudié les rapports écosystémiques entre les pollinisateurs et leur environnement. En effet, plus de 75 % des cultures alimentaires dépendent des pollinisateurs, en grande majorité des pollinisateurs sauvages qui maintiennent la biodiversité essentielle aux besoins agricoles. Pourtant, un déclin significatif est constaté en grande majorité chez ces pollinisateurs sauvages. Et encore, ces conclusions ne comportent que les espèces dont les données sont suffisantes pour définir leur statut (moins de la moitié des espèces en Europe par exemple). Les raisons impliquant cette menace sont surtout liées aux modifications de l’habitat et à l’agriculture intensive utilisant les produits phytosanitaires. De plus, le changement climatique prend de plus en plus d’ampleur sur la répartition des populations et impacte leur activité saisonnière. Ainsi, quel est l’impact de chacun de ces facteurs sur chaque continent, et quelles conséquences auront-ils sur les besoins alimentaires des populations humaines ?
Collecter plus de données pour évaluer précisément les menaces liées au déclin des pollinisateurs
L’évaluation précédente de l’IPBES a donc pu déterminer les principaux facteurs mondiaux impactant le déclin des pollinisateurs. Ainsi, cette consultation d'experts, opérée dans le cadre de la méthode DELPHI, s’est focalisée distinctement sur l’intensité du risque de chaque impact causé par ces facteurs (impact du déficit de pollinisation, de l’instabilité du rendement, etc…), sur chaque continent.
La réduction de la pression exercée par les changements dans les paysages et les produits phytosanitaires a été identifiée comme une priorité politique car ces facteurs sont considérés comme très importants pour la plupart des continents. La perte de la biodiversité des pollinisateurs a été jugée partout comme un risque important, mettant en péril les avantages qu'ils procurent aux humains, tels que les rendements des cultures dépendant des pollinisateurs (un risque sérieux dans quatre des six continents). Et bien que l’impact du changement climatique reste encore une énigme, il est très susceptible d’interagir dans le temps avec les autres facteurs menaçant les pollinisateurs. Le mieux actuellement serait donc d’orienter les actions de recherche et de sauvegarde sur les moyens pouvant atténuer ces facteurs ou bien de s’y adapter.
Cependant, le manque de données et de connaissances reste très important pour la majorité des impacts dans de nombreuses régions, surtout en Afrique. Cette évaluation révèle une grande incertitude concernant l'impact du déclin des pollinisateurs sur les bénéfices pour les populations humaines. Les évaluations doivent s'appuyer sur des jugements d'experts qui restent vulnérables à la partialité humaine. Il est donc essentiel de disposer de davantage de données sur les régions ou les sujets peu étudiés afin d’améliorer les connaissances et réduire l'incertitude.
RÉFÉRENCES
- Dicks, L. V., Breeze, T. D., Ngo, H. T., Senapathi, D., An, J., Aizen, M. A., Basu, P., Buchori, D., Galetto, L., Garibaldi, L. A., Gemmill-Herren, B., Howlett, B. G., Imperatriz-Fonseca, V. L., Johnson, S. D., Kovács-Hostyánszki, A., Kwon, Y. J., Lattorff, H. M. G., Lungharwo, T., Seymour, C. L., Vanbergen, A. J. & Potts, S. G. 2021. A global-scale expert assessment of drivers and risks associated with pollinator decline. Nature Ecology & Evolution. 5, 1453–1461 (2021) https://doi.org/10.1038/s41559-021-01534-9
- Potts, S. G., Imperatriz-Fonseca, V., Ngo, H. T., Aizen, M. A., Biesmeijer, J. C., Breeze, T. D., Dicks, L. V., Garibaldi, L. A., Hill, R., Settele, J. & Vanbergen, A. J. 2016. Safeguarding pollinators and their values to human well-being. Nature, 540, 220–229. https://doi.org/10.1038/nature20588