Alimentation, santé globale 2 min

La culture de follicules plumeux in vitro : un nouveau modèle alternatif chez la poule

Afin de trouver une alternative à l’expérimentation animale, des chercheurs de l’UMR ISP ont mis au point la culture in vitro de follicules plumeux de poule. Ces follicules comportent notamment l’épithélium, l’unique tissu jouant un rôle majeur dans la transmission de la maladie de Marek, lymphome d’origine virale. Ce nouveau modèle permettra de reproduire in vitro cette infection virale pour la comprendre, mais il représente un défi scientifique : le follicule de la plume est un des plus complexes du règne animal…

Publié le 20 avril 2023

illustration La culture de follicules plumeux in vitro : un nouveau modèle alternatif chez la poule
© MALLET Corentin

À ce jour, de nombreuses recherches en infectiologie nécessitent le recours à l’expérimentation animale, faute d’alternatives. C’est le cas par exemple de l’évaluation des vaccins (réponse immunitaire et épreuve par un pathogène) ou de l’étude des interactions entre pathogènes et tissus complexes. En France, ces études sont strictement encadrées réglementairement conformément à la charte nationale sur l’éthique en expérimentation animale.

Chez les oiseaux, des milliers de follicules plumeux, localisés dans la profondeur de la peau permettent la formation des plumes. Le développement du follicule et de la plume compte parmi les plus complexes du règne animal. Réalisé dans le cadre du projet ANIMALT, un travail de recherche a été mené par l’équipe « Biologie des virus aviaires » de l’UMR Infectiologie et santé publique (ISP) et étudie l’herpesvirus de la maladie de Marek (MDV), et plus particulièrement l’épithélium du follicule plumeux. En effet, il s’agit de l’unique tissu permettant une réplication productive du virus chez la poule ainsi que son excrétion dans l’environnement et de sa transmission. En l’absence de modèles in vitro de follicules plumeux, l’étude de la réplication du MDV dans ce tissu est restreinte à l’animal. Aussi avons-nous cherché à développer un tel modèle chez la poule, une espèce pour laquelle il existe globalement peu de modèles alternatifs à ce jour.

Chez l’humain, le développement d‘alternatives pour la peau et ses appendices a connu un essor considérable depuis les années 1980. Citons par exemple l’avènement des modèles de peau reconstruite qui a permis le bannissement des tests de cosmétiques sur animaux au niveau de l’Union Européenne*. La culture in vitro de follicules pileux humains est un autre exemple d’alternative ayant émergé. Elle consiste à disséquer des follicules pileux à partir de pièces de résection chirurgicale du cuir chevelu pour les cultiver in vitro afin d’être ensuite réimplantés à d’autres êtres humains ou bien utilisés pour tester des molécules. En dépit des différences structurelles et anatomiques évidentes entre follicules pileux humains et plumeux de poule, de nombreuses homologies sont toutefois partagées. De ce fait, nous avons entrepris de tester sur les follicules plumeux un protocole de culture in vitro déjà existant pour les follicules pileux.

La culture in vitro de follicules plumeux de poule en croissance a récemment été rapportée pour la 1ère fois à partir de follicules disséqués**. Ces follicules plumeux ont une survie de sept jours, sur la base de leur structure histologique et de leurs caractéristiques moléculaires.

Plusieurs follicules plumeux en culture in vitro et un zoom
Des follicules plumeux in vitro.

À ce jour, ce modèle n’est pas parfait, car il n’abolit pas totalement l’utilisation d’animaux mais permettra tout de même d’en réduire le nombre. À plus long terme, l’objectif serait de pouvoir prélever des fragments de peau emplumée sur des donneurs, sans avoir à les euthanasier.

Avec ce nouveau modèle, nous visons à reproduire, grâce à l’équipe de Caroline Denesvre, l’infection virale de follicules plumeux par le MDV comme cela est décrit chez la poule infectée.

Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet ANIMALT, coordonné par Sonia Lamandé (UMR ISP), soutenu financièrement par la Région Centre-Val de Loire et le FEDER. Ce programme vise à réduire l’utilisation d’ANIMaux en recherche à travers le développement de modèles ALTernatifs ex vivo***.

Références :

*Regulation (EC) No 1223/2009 of the European Parliament and of the Council of 30 November 2009 on cosmetic products, OJ L 342, 22.12.2009: https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/?uri=CELEX:02009R1223-20221217&from=EN ;
Souci L, Denesvre C. 3D skin models in domestic animals. Vet Res. 2021;52(1):21. https://veterinaryresearch.biomedcentral.com/articles/10.1186/s13567-020-00888-5

**Mallet C, Souci L, Ledevin M, Georgeault S, Larcher T, Denesvre C. Establishment of a culture model for the prolonged maintenance of chicken feather follicles structure in vitro. PLOS ONE. 2022;17(10):e0271448. https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0271448

***Lamandé S. Article e-confluence 010 - 18 janvier 2023. Retour sur le séminaire « Organoïdes et recherche agronomique » organisé à l’Ecole nationale vétérinaire d'Alfort : Intranet INRAE Val de Loire - Retour sur le séminaire « Organoïdes et recherche agronomique ».

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