Agroécologie 3 min

Conception et création d'une machine pour optimiser l’élevage d’insectes

Laurent Lamy, technicien INRAE à l’Institut Sophia Agrobiotech, a récemment conçu le prototype d’une machine permettant d’améliorer les techniques d’élevage de trichogrammes en laboratoire, notamment pour leur méthode de nourrissage. Coup de projecteur sur cette innovation qui commence déjà à porter ses fruits et encourage la dynamique entre la recherche et les FabLabs !

Publié le 01 mars 2022

illustration Conception et création d'une machine pour optimiser l’élevage d’insectes
© INRAE, Mylène LE CAER

Comment automatiser et optimiser le nourrissage d’insectes ?

Plusieurs laboratoires d’INRAE élèvent des insectes parasitoïdes (se développant dans le corps de leur hôte jusqu’à le tuer), afin d’étudier leur capacité à éliminer des ravageurs de cultures. Parmi eux sont régulièrement utilisés les trichogrammes. Ces micro-guêpes, plus petites qu’un millimètre, nécessitent une méthode d’élevage très minutieuse surtout pour leur nourrissage. La technique consiste à verser sur la paroi des tubes de verre où ils sont élevés un fil de miel, le plus fin possible afin que les individus ne s’y engluent pas. Une tâche longue à effectuer, demandant patience, rigueur et dextérité. Eviter ce miellage à la main serait d’une grande utilité pour la recherche. Cela permettrait de libérer un temps considérable pour les équipes, et surtout d’éviter les pertes d’individus en masse, qui peuvent avoir de lourdes conséquences sur les expérimentations. C’est dans ce cadre que Laurent Lamy, technicien de recherche à l’Institut Sophia Agrobiotech, a imaginé une machine qui nourrit automatiquement les élevages en un temps record.

Une invention récompensée

C’est en découvrant par hasard les activités du FabLab, un atelier de fabrication ouvert au public proche de l’Institut Sophia Agrobiotech où il travaille, que Laurent Lamy a imaginé cette machine. Encouragé par le manager du FabLab « SoFab » et soutenu par sa responsable de projet Géraldine Groussier, Laurent Lamy s’est alors lancé dans deux mois intenses de conception d’un prototype dans le cadre du concours TOCS (Trophée Objets Connectés et Services), où il s’est vu récompensé à deux reprises pour son invention. La machine a été construite à partir du châssis d’une imprimante 3D auquel un pousse-seringue, conçu sur-mesure par impression 3D, a été rajouté. Fixé au châssis, il a pour but de réguler le fil de miel versé dans chaque tube. La programmation quant à elle a pu se faire via le langage déjà paramétré pour le châssis. Laurent Lamy s’est découvert une grande motivation pour ce projet et a acquis de nouvelles compétences, que ce soit dans la programmation, la modélisation ou encore l’impression 3D. Le fil de miel étant à ce jour encore très irrégulier, il reste à trouver comment améliorer cet outil, peut-être en choisissant un modèle d’aiguille différent, ou en jouant sur la température du miel pour fluidifier sa viscosité. Son optimisation permettra à long-terme de devenir un outil dont les laboratoires ne pourront plus se passer et potentiellement une adaptation à d’autres élevages d’insectes.

Une coopération fructueuse entre équipes de recherche et FabLabs

De plus en plus d’équipes de recherche font appel aux FabLabs pour des aspects techniques étant donné la spécificité des manipulations mises en œuvre dans leurs projets. Il est effectivement bien difficile de trouver des outils adaptés déjà existants sur le marché. Le FabLab, de son côté, dispose de nombreux matériels de fabrication et reste très accessible financièrement. Selon Géraldine Groussier, « cette démarche nous force à avoir de l’ingéniosité, de s’adapter par rapport à nos moyens et à ce que l’on connaît, et c’est ce qui est stimulant ». Au-delà de la réussite technique, se dégage également une forte dimension sociale, par la rencontre d’autres créateurs locaux et le renforcement de l’esprit d’équipe autour de ce projet. Une collaboration prometteuse pour l’avancée de projets de recherche qui devrait prendre de l’ampleur. Laurent Lamy espère pouvoir finaliser son prototype d’ici un an et réaliser pleins d’autres machines pour lesquelles des idées foisonnent déjà dans sa tête. 

Un FabLab, qu’est-ce que c’est ?
Un FabLab est un atelier de fabrication ouvert au public comportant de nombreux outils et machines-outils : imprimantes 3D, machines à gravure laser, fraiseuses à commande numérique, outils de bricolage, … Ils sont mis à libre disposition pour la conception et la réalisation d’objets de toutes sortes, allant de l’artisanat au numérique. Les FabLabs sont réputés pour leur dynamisme et leur ouverture à tous types de projets, que ce soit à la demande d’entreprises, d’associations, de designers, d’artistes, de bricoleurs ou même d’amateurs. Tous les publics sont les bienvenus, que ce soit pour des projets personnels ou professionnels. Ils favorisent un espace de rencontre et de collaboration entre communautés, tranches d’âges et métiers très divers, avec un accompagnement personnalisé tout au long du projet.

Mylène Le CaërRédactriceDépartement SPE

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Laurent LAMY TechnicienInstitut Sophia Agrobiotech (ISA)

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