Biodiversité 2 min

Une coalition de chercheurs appelle à la prise en compte de la biodiversité génétique dans l’accord mondial de la Convention sur la Diversité Biologique.

Signée par 150 chefs de gouvernement lors du Sommet de Rio en 1992, la Convention sur la diversité biologique, CDB, est dédiée à la conservation de la biodiversité, son utilisation durable et au partage juste des avantages qui en découlent

Publié le 06 juillet 2022

illustration Une coalition de chercheurs appelle à la prise en compte de la biodiversité génétique dans l’accord mondial de la Convention sur la Diversité Biologique.
© INRAE

La Convention reconnaît que la diversité biologique représente bien plus que les plantes, les animaux et les micro-organismes et leurs écosystèmes - elle concerne les populations et leur besoin de sécurité alimentaire, de médicaments, d'air frais et d'eau, d'abris et d'un environnement propre et sain dans lequel vivre. Dans le contexte actuel, où la biodiversité est plus menacée que jamais et où on constate l’échec des objectifs Aichi de biodiversité à atteindre en 2020, l’enjeu est de taille, avec un nouvel accord mondial pour la biodiversité en préparation qui sera finalisé à la COP 15 en décembre 2022 au Canada.

La Coalition pour la génétique de la conservation est un groupe de chercheurs et de spécialistes qui s’engagent pour la conservation de la diversité génétique. Elle est composée du groupe de travail sur la composition génétique de GEO BON, du groupe de spécialistes de la génétique de la conservation de l'UICN, du groupe de travail sur la génétique de la conservation de la Society for Conservation Biology et de l’Action COST de l'UE "Connaissance de la biodiversité génomique pour des écosystèmes résilients", G-BiKE.

Cette Coalition pour la diversité génétique émet des recommandations à la CDB pour la diversité génétique en vue de la COP 15. La coalition a salué la formulation par la CDB de l’Objectif A* qui intègre le maintien de la diversité génétique de toutes les espèces cultivées et sauvages comme objectif à atteindre en 2050, avec un point d’étape en 2030, ainsi que l’inclusion d’un indicateur génétique en tant qu’indicateur phare pour mesurer le progrès vers cet objectif. Il s’agit de l’indicateur « proportion des populations au sein d’une espèce avec une taille génétiquement efficace (Ne) > 500 », qui reflète la taille nécessaire pour qu’une population puisse s’adapter génétiquement aux conditions environnementales changeantes et qui permet de réduire drastiquement son risque d’extinction. Ce seuil de taille génétiquement efficace de 500 est bien établi dans la littérature scientifique comme un minimum sûr durable pour maintenir la diversité génétique.

La diversité génétique au sein des populations permet une variation suffisante dans chaque population pour s'adapter aux conditions locales au fil du temps et pour éviter les conséquences de la consanguinité. La diversité génétique entre les populations permet à l'ensemble de l'espèce de maintenir une adaptation suffisante à des environnements changeants. Ces deux éléments sont essentiels à la survie des espèces et au maintien d'écosystèmes résilients.

Les indicateurs génétiques proposés par la Coalition ont l’avantage de ne pas nécessairement faire appel à des connaissances liées à l’analyse ADN (extraction, etc.). Ainsi, l’indicateur Ne > 500 peut être déduit en utilisant la taille de recensement des individus adultes, Nc, à partir de rapports ou de bases de données disponibles. Un projet en cours, mené par des chercheurs et du personnel d'agences pour la biodiversité et l'environnement en Afrique du Sud, au Mexique, en Suède, au Japon, en Belgique, en France (dont INRAE, UMR Biogeco) et en Australie, met à l’épreuve ces indicateurs. Ils testent différentes sources de données, l'automatisation de la collecte des données et la création d'un document d'orientation détaillé à l'intention des parties.

Les membres de la Coalition sensibilisent actuellement les parties prenantes à la CDB pour une formulation consensuelle, ambitieuse de l’Objectif A* sur l’intégrité des écosystèmes et la réduction du risque d’extinction des espèces lors de la COP 15, proposant le maintien de 97% de la diversité génétique de toutes les espèces en 2050. Ils proposent aussi pour le point d’étape à 2030 une augmentation de 25% de populations qui remplissent le critère Ne > 500 et le maintien de toutes les populations génétiquement distinctes, ainsi que, pour l’Objectif-Action 4, la mise en place de stratégies de gestion et de restauration de la diversité génétique afin de sécuriser le maintien de cette diversité à long terme. Aussi, ils proposent que l’indicateur accessoire « proportion de populations génétiquement distinctes préservées au sein d’une espèce » soit élevé au rang d’indicateur phare pour suivre le progrès vers l’Objectif A, le point d’étape à 2030 et l’Objectif-Action 4. La Coalition espère que les parties prenantes à la CDB puissent tenir compte de ces recommandations dans leur accord mondial pour la biodiversité lors de la COP 15, pour une protection efficace de la diversité biologique pour tous les humains.

Objectif A du cadre mondial post-2020 de biodiversité de la CDB : 
L'intégrité de tous les écosystèmes est renforcée, avec une augmentation d'au moins 15 % de la superficie, de la connectivité et de l'intégrité des écosystèmes naturels, favorisant des populations saines et résilientes de toutes les espèces, le taux d'extinction a été divisé au moins par dix et le risque d'extinction des espèces dans tous les groupes taxonomiques et fonctionnels est réduit de moitié, et la diversité génétique des espèces sauvages et domestiquées est sauvegardée, avec le maintien d'au moins 90 % de la diversité génétique de toutes les espèces.

 

Grégory Lambert Chargé de communicationSDAR

Contacts

Myriam Heuertz Directrice de rechercheUNITÉ MIXTE DE RECHERCHE "BIOLOGIE GENES ET COMMUNAUTÉ"

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