Société et territoires 4 min
Aménagement : un nouvel outil pour évaluer la pertinence de la compensation écologique par l’offre
Dans le cadre de ses missions d’appui aux politiques publiques, le Laboratoire ÉcoSystèmes et Sociétés En Montagne d’INRAE a développé une Grille d’Évaluation de la Pertinence Écologique (GEPE) des Sites Naturels de Compensation, de Restauration et de Renaturation (SNCRR).
Présentation de ce dispositif.
Publié le 18 septembre 2024
La compensation écologique : pourquoi et comment ?
La prévention et la réparation des impacts de l’aménagement du territoire (construction d’un lotissement, d’une ligne de chemin de fer, etc.) est une obligation législative contenue dans le Code de l’Environnement. Les aménageurs ont l’obligation de produire une évaluation environnementale et de se conformer à la séquence Éviter - Réduire - Compenser (ERC). La séquence ERC a pour objectif d’atteindre la non-perte nette de biodiversité dans les projets d’aménagement, ce qui signifie qu’un projet d’aménagement n’est autorisé que s’il n’entraîne pas une perte de biodiversité à l’échelle locale.
La compensation consiste à produire des gains écologiques sur un autre site que le site impacté par l’aménagement, permettant de compenser les impacts résiduels significatifs (qui n’ont pu être ni évités ni réduits) sur le site aménagé. Ces gains de biodiversité sont obtenus par la mise en place de techniques de restauration écologique visant des habitats ou des espèces. Ces gains peuvent être obtenus par une approche dite « à la demande », mise en place par l’aménageur pour ses propres besoins et simultanément à la conception de son projet ou « par l’offre », mise en place par un opérateur de compensation de manière anticipée et mutualisée. En France, la compensation par l’offre est organisée par le dispositif de « Site Naturel de Compensation, de Restauration et de Renaturation ».
Quels outils pour déterminer la pertinence écologique d’un projet de compensation ?
Le Laboratoire des Écosystèmes et Sociétés en Montagne (LESSEM) travaille depuis 2018 sur l’évaluation des projets de compensation écologique en s’appuyant sur les connaissances issues de la recherche scientifique en écologie ainsi que sur les retours d’expérience de porteurs de projets et de services instructeurs de l’État. Le LESSEM est ainsi financé par le Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires et travaille en collaboration avec l’Office Français de la Biodiversité et des scientifiques du Muséum National d’Histoire Naturelle.
Soutenu par le Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires, le LESSEM développe depuis 2019 un outil d’évaluation des projets de SNCRR, en amont de leur dépôt auprès des services instructeurs, pour en améliorer la qualité. Cet outil, construit sous forme de grille d’évaluation, est donc à la fois un outil d’appui pour les services instructeurs de l’État et pour les opérateurs de compensation. Cette méthode prend la forme d’une « check-list » qualitative composée de 34 critères permettant de s’assurer que l’ensemble des critères conditionnant la pertinence écologique ont été analysés. Elle a pour objectif d’une part de faciliter l’analyse des dossiers par les services instructeurs, et d’autre part d’aider les porteurs de projet à auto-évaluer la qualité de leur projet de compensation.
Avant la création de cette grille d’évaluation, de nombreux échecs étaient observés sur les sites de compensation, ce qui entrait en contradiction avec l’objectif de non-perte nette de biodiversité dans l’aménagement.
Pour le LESSEM, les objectifs étaient donc :
- de définir les notions de pertinence écologique et de gain écologique potentiel pour un site de compensation « par l’offre »,
- d'identifier les facteurs d’échec et de réussite des projets de compensation,
- de proposer une grille d’évaluation pondérée permettant de connaître la pertinence écologique d’un projet de compensation avant sa mise en œuvre.
Les principaux facteurs d’échecs identifiés étaient les suivants :
- L’impossibilité de quantifier précisément le gain obtenu : absence d’état initial du site de compensation, des protocoles de suivi et du plan de gestion,
- Un potentiel de gain écologique du site trop faible : site non propice à la création d’un gain écologique, par exemple déjà en bon état de conservation à l’état initial
Appui aux politiques publiques
Depuis 2023, la Grille d’Évaluation de la Pertinence Écologique a été testée avec des Directions Régionales de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement (DREAL) et des Directions Départementale des Territoires (DDT), organismes instructeurs des dossiers de SNCRR.
La grille d’évaluation permet une évaluation qualitative, simple et transparente sur laquelle opérateurs et services instructeurs peuvent échanger. L’analyse et l’instruction des dossiers et des demandes de compléments s’en trouvent facilitées.
En 2024, ce sont 13 formations qui ont été dispensées par Caroline Jaugey (Chargée de mission compensation écologique - SNCRR au sein du LESSEM) au personnel des DREAL, des DDT, de l’Office Français de la Biodiversité ou encore de bureaux d’études. À ce jour, 80 personnes ont été formées aux principes de la compensation écologique par l’offre, aux modifications réglementaires liées à la Loi Industrie Verte et à l’utilisation de la Grille d’Évaluation de la Pertinence Écologique.
Pour aller plus loin :
- La Grille d’Évaluation de la Pertinence Écologique
- Une foire aux questions dédiée aux SNCRR :