Agroécologie 8 min
Programme Prioritaire de Recherche "Cultiver et Protéger Autrement" : 3 projets retenus sur le centre Pays de la Loire dans le cadre du Programme Investissements d’avenir : SUCSEED, CAP ZERO PHYTO et SPECIFICS
L’appel à projets national "Cultiver et protéger autrement" vise à développer des alternatives aux produits phytosanitaires. Parmi les lauréats l'unité IRHS (Institut de Recherche en Horticulture et Semences) est partie prenante de trois projets et l’unité LEVA, partenaire d’un de ces projets. Une nouvelle reconnaissance du savoir-faire du pôle végétal angevin.
Publié le 22 septembre 2020
En 2018, Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, avait retenu le site INRAE d'Angers pour annoncer le lancement d’un Programme prioritaire de recherche (PPR) devant permettre l’émergence, à l’horizon 2030-2040, "d’une agriculture sans pesticides", mobilisant les leviers de l’agroécologie, du biocontrôle et de la prophylaxie.
Parmi les dix dossiers sélectionnés au plan national par l’Agence nationale de la recherche (ANR), trois impliquent l’unité de recherche angevine IRHS, comme pilote ou partenaire, dont un en lien avec l'unité LEVA.
L'unité IRHS, à Angers, regroupe les principaux acteurs de la recherche ligérienne en biologie végétale, sous les tutelles d’INRAE, d'Agrocampus Ouest et de l'Université d'Angers, au service de la qualité et santé des espèces horticoles et de la production de semences. Sa mission est d'œuvrer au développement de systèmes de production performants, sains et durables pour ces filières à vocation tant alimentaire qu'ornementale.
L'unité LEVA (Légumineuses, Ecophysiologie Végétale, Agroécologie) est une unité sous contrat INRAE - École supérieure d’agricultures. L’équipe développe des questions de recherche visant à la conception d’associations de cultures incluant des légumineuses répondant aux enjeux de mutation de l’agriculture vers des systèmes de culture moins dépendants des intrants (engrais synthétiques et pesticides) et plus résilients face aux aléas (climat, volatilité des coûts des intrants...).
Focus sur le projet SUCSEED : mettre fin à l'utilisation des pesticides sur les semences et proposer des solutions alternatives
Les semences jouent un rôle central dans notre système agricole, elles sont au cœur de notre production alimentaire et de nos échanges commerciaux dans un marché de plus en plus globalisé. Dans ce contexte, garantir une qualité sanitaire élevée des semences est cruciale pour prévenir l'émergence de maladies et sécuriser la production alimentaire. Actuellement, la gestion de la santé des cultures dépend de l’utilisation de produits phytosanitaires sur les parties végétatives et les semences. Or, ces produits ont un impact délétère avéré sur la santé humaine mais aussi l'environnement et la biodiversité.
Le projet SUCSEED (Stop the Use of pestiCides on Seeds by proposing alternatives) repose donc sur la nécessité d'identifier et de développer des solutions innovantes à la protection des semences via des approches naturelles, efficaces et éco-responsables. Ce projet vise à faire de la semence un acteur central de la gestion de la santé des plantes en se concentrant sur deux problèmes phytosanitaires majeurs :
- les pathogènes transmis à et par les semences
- les fontes de semis (i.e. absence de germination/émergence des graines causée par des pathogènes).
Ces recherches seront conduites sur quatre espèces végétales d'intérêt agronomique : blé, tomate, haricot commun et colza, et leurs agents pathogènes majeurs respectifs.
Pour identifier des solutions alternatives aux pesticides, SUCSEED propose trois leviers d’action :
- l'amélioration des défenses des semences,
- le pilotage du microbiote des semences
- la modification du microenvironnement des graines en germination.
Les solutions novatrices obtenues via ces trois leviers seront formulées à l’aide d’approches technologiques adaptées aux semences et déployées sur un large éventail de génotypes et de conditions environnementales afin de valider leur efficacité potentielle et leur commercialisation. Ces développements scientifiques et techniques seront accompagnés de recherches en sciences humaines et sociales, y compris en recherche réglementaire et économique, afin d'anticiper les besoins ou les obstacles au développement de ces produits, leur appropriation par les acteurs de l'industrie semencière et l'acceptabilité de la société et des politiques à ces nouvelles innovations.
Les résultats attendus de ce projet sont :
- Scientifiques avec l'émergence de connaissances fondamentales sur la physiologie des semences et les interactions graines-microorganismes ;
- Techniques avec le développement de solutions alternatives aux pesticides et leurs déploiements via des traitements de pointe adaptés aux semences ;
- Industriels avec la projection des stratégies/trajectoires pour atteindre le marché en tenant compte du contexte réglementaire ;
- Sociétaux avec les attentes des professionnels et des consommateurs ;
- Éducatifs avec la formation des futurs acteurs du secteur semencier.
Partenaires : ce projet est coordonné par Matthieu Barret (Directeur de recherche INRAE à l’UMR IRHS à Angers), et regroupe 13 partenaires :
Organismes de recherche : INRAE, CNRS, GEVES
Établissements d’enseignement supérieur et de recherche : Université d’Angers, Université Clermont Auvergne, Agrocampus Ouest, Université Paris-Saclay, Université Paris II Panthéon-Assas, AgroParisTech Paris
Entreprises : UFS, IBMA France, AFAIA, Frayssinet
Durée du projet : 6 ans
Contact : Matthieu Barret
Focus sur le projet CAP ZERO PHYTO : Adaptation du concept d’immunité écologique à la protection des cultures : Rosaceae et Solaneae, deux cas d’étude
La capacité des plantes à utiliser leur propre système immunitaire pour lutter contre les maladies et ravageurs est au cœur du projet CAP ZERO PHYTO.
L’objectif est en effet de proposer de nouvelles stratégies de protection des cultures basées sur l’utilisation combinée de leviers immunitaires destinés à moduler les mécanismes de défense des cultures. Le concept d’immunité écologique, décrit pour les animaux, sera adapté : il s’agit d’avoir une vision intégrée de l’expression de l’immunité, en considérant tous les facteurs favorisant son expression, les sources de variabilité et les interactions entre ces paramètres. Pommier et tomate, avec leurs principaux bioagresseurs, seront les cultures modèles de ce projet, avant transition vers d’autres Rosaceae (pêche et fraise) et Solanaceae (poivron). Six leviers immunitaires seront explorés seuls et en combinaison : résistance génétique, plantes de service, solutions de biocontrôle avec une action SDP (stimulation de défense des plantes), flashs d’UV-C, stress mécanique et apport d’azote.
Partenaires : Le projet est coordonné par Catherine Coutand (INRAE à Avignon). Marie-Noëlle Brisset (INRAE à Angers) est co-leader sur le pommier, et Bernard Caromel (INRAE à Avignon) est co-leader sur la tomate.
Le consortium regroupe un large panel d’experts scientifiques des cultures (unités IRHS, Horti, PSH), de leurs bioagresseurs (unités IRHS, PV, IGEPP, PSH, ISA, LAE), des leviers ciblés (unités RHS, IGEPP, PSH, GAFL, PV, Qualisud, ISA, LAE) et de techniques analytiques diverses (unités IRHS, LAE, CEFE, ISA, Granem) pour atteindre l’objectif du projet. Il travaillera avec des professionnels (CTIFL, GRCETA, APREL, Invenio, CA06) et des économistes pour assurer la pertinence, la faisabilité et l’acceptabilité des stratégies proposées. Le consortium inclut des représentants de l’enseignement supérieur (unités IRHS, IGEPP, Granem, Qualisud, ISA, LAE), qui garantiront la dissémination des résultats dans les cursus académiques.
Focus sur le projet SPECIFICS : lutte durable contre les parasites dans les systèmes de culture innovants riches en fabacées
Le challenge du projet SPECIFICS (Sustainable pest control in Fabaceae-rich innovative cropping systems) est d'atteindre deux objectifs importants et disruptifs : développer des systèmes de culture zéro pesticide pour réduire l'impact négatif de ces produits chimiques sur la santé publique et sur l'environnement, et augmenter la superficie de légumineuses pour aller vers une plus grande autonomie protéique en France et en Europe.
L’objectif de SPECIFICS est d’identifier et d’évaluer différents leviers permettant la transition vers des systèmes de grandes cultures sans pesticides et incluant des légumineuses à graines en recherchant de nouvelles sources de résistance, en intégrant davantage de diversité biologique dans le temps (rotation) et dans l’espace (cultures associées intra- et interspécifiques, infrastructures agro-écologiques, etc), en étudiant des solutions de valorisation et de promotion de ces systèmes. Notre projet allie agronomes, généticiens, pathologistes, entomologistes, écologues, économistes et sociologues pour concevoir des variétés, conduites, itinéraires techniques, modes de valorisation et de conseil qui permettront d’atteindre les objectifs de durabilité économique et agronomique des systèmes de culture sans pesticides et intégrant une part importante de légumineuses à graines. Nos expérimentations s’appuieront notamment des plateformes expérimentales en agroécologie, dans lesquelles des systèmes de culture sans pesticides et riches en légumineuses sont largement mis en œuvre, ainsi que sur un large dispositif d’enquêtes et de traitement de données économiques.
Partenaires : ce projet est coordonné par Judith Burstin (Dijon).
Deux unités angevines sont impliquées, notamment l’unité IRHS avec l’équipe SEED et l'unité LEVA.
L'IRHS (équipe SEED) aura comme objectif de perfectionner les outils de phénotypage mis en place dans le projet H202O EUCLEGE et de réaliser une analyse pangénomique de la qualité germinative du pois sur une collection de 170 génotypes. Ces données participeront à l’élaboration de génotypes adaptés aux nouveaux systèmes de culture sans pesticide.
L'unité LEVA s’intéressera aux modes d’insertion des légumineuses dans les systèmes de culture pour concevoir des systèmes "0 pesticides". Il prendra en compte aussi les processus décisionnels des agriculteurs et participera à la production d’indicateurs et de tableaux de bords pour accompagner la conduite de ces systèmes innovants.