Alimentation, santé globale 3 min

Une piste prometteuse pour améliorer la durabilité des repas scolaires en France

COMMUNIQUE DE PRESSE - La cantine scolaire doit fournir aux enfants des repas de bonne qualité nutritionnelle, tout en répondant aux enjeux environnementaux et économiques actuels. Est-il possible d’ajuster les menus, pour diminuer l’impact carbone et conserver un équilibre nutritionnel ? Des chercheuses d’INRAE, en collaboration avec MS-Nutrition apportent un résultat prometteur, à l’aide d’un modèle mathématique poussé. Leurs travaux, parus le 24 mars dans European Journal of Nutrition, suggèrent que servir aux enfants des repas végétariens 3 fois par semaine et du poisson et de la viande blanche* aux 2 autres repas de midi est une piste intéressante pour concilier bonne nutrition et respect de l’environnement.

Publié le 28 mars 2022

illustration Une piste prometteuse pour améliorer la durabilité des repas scolaires en France
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En France, ce sont 8,5 millions de déjeuners qui sont servis chaque semaine à la cantine scolaire. Pour assurer un bon équilibre nutritionnel des menus, lutter contre la précarité alimentaire et instaurer des comportements alimentaires plus durables chez les enfants, des règles spécifiques obligatoires existent déjà.

 

Les repas doivent être structurés avec 4 ou 5 composantes et respecter 15 règles de fréquence de service, pour 15 types de plats sur 20 repas. De plus, pour réduire l’impact environnemental des repas, la loi « EGalim » exige depuis le 1er novembre 2019, le service d’au moins un repas végétarien par semaine. Mais quel serait le meilleur compromis pour réduire encore plus l’impact environnemental sans faire de concessions sur la qualité nutritionnelle ?

 

C’est l’objet des travaux de chercheuses INRAE, en collaboration avec MS-Nutrition : identifier des leviers pour améliorer la durabilité des repas servis aux écoliers. Quatre leviers ont été sélectionnés :

  1. Réduire de 5 à 4 le nombre de composantes des repas ;
  2. Respecter les 15 règles de fréquence imposées par la loi et 5 recommandations supplémentaires spécifiques aux repas végétariens1 ;
  3. Augmenter le nombre de repas végétariens ;
  4. Eviter la viande rouge

Les leviers ont été analysés seuls ou en combinaison dans 17 scénarios différents. Pour chaque scénario, 100 séries de 20 repas scolaires ont été générées automatiquement, en couplant un tirage aléatoire de plats au sein d’une base de données de 2316 plats scolaires. La qualité nutritionnelle des séries de repas a été évaluée sur la base du score d’Adéquation Nutritionnelle Moyenne (ANM) pour 2000 kcal. L’impact environnemental a été mesuré par plusieurs indicateurs :  émissions de gaz à effet de serre (EGES), potentiel d’acidification sur les écosystèmes terrestre et d’eau douce, utilisation de l'eau et des ressources fossiles, eutrophisation d'eau douce et marine et usage des terres.

 

Résultats :

  1. Les repas à 4 composantes ont une teneur énergétique qui pourrait ne pas suffire à tous les enfants et leur impact environnemental est peu diminué par rapport aux repas à 5 composantes ;
  2. Respecter les 20 règles fréquentielles garantit une bonne qualité nutritionnelle (ANM=95,3% d’adéquation) mais augmente légèrement les impacts environnementaux des repas ;
  3. Augmenter le nombre de repas végétariens réduit les impacts environnementaux (jusqu'à -61,2% d’EGES pour 20 repas végétariens) mais diminue la qualité nutritionnelle, en particulier lorsque les 20 repas sont végétariens (ANM = 88,1% d’adéquation) ;
  4. Augmenter la fréquence des repas végétariens jusqu’à 12 repas sur 20 et servir du poisson et des viandes blanches aux autres repas semble être le meilleur compromis pour réduire de moitié les EGES des repas scolaires en maintenant leur bonne qualité nutritionnelle.

Ce dernier scénario prometteur, incluant 3 repas végétariens par semaine, 1 fois du poisson et 1 fois de la viande blanche plutôt que rouge au 5ème repas, nécessite néanmoins une révision de la réglementation actuelle. En effet, cette dernière impose le service de viande rouge à l’école (au moins 4 repas sur 20). Réformer la restauration scolaire dans ce sens aurait un impact qu’il est important d’examiner sur les systèmes alimentaires, en considérant en particulier tous les acteurs des chaînes d'approvisionnement des marchés publics.

 

Au menu ce mois-ci : des plats variés, équilibrés et durables

Les repas servis en cantine scolaire répondent aux besoins nutritionnels des enfants, en proposant une alimentation variée et de qualité. Depuis 2011, 15 règles sont imposées pour l’établissement des menus mensuels (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000024614763). Une étude d’INRAE a précédemment montré que le respect de ces règles garantissait une très bonne qualité nutritionnelle aux repas servis. Par exemple, il est obligatoire de servir un repas par semaine avec du filet entier de poisson. Mais il est aussi obligatoire de servir un repas par semaine avec de la viande rouge non hachée. Or, le Programme national nutrition santé (PNNS) recommande la diminution de la consommation de viande rouge. L’évolution de ces règles est donc une piste de travail qui intéresse nos chercheurs.

 

Pour plus d’informations : https://www.education.gouv.fr/la-restauration-scolaire-6254

* Incluant le porc et la volaille

 

[1] Le Conseil National de la Restauration Collective (CNRC) recommande 5 règles supplémentaires de fréquence de service de différents types de plats végétariens.

 

[2] Vieux F, Dubois C, Duchêne C, Darmon N. Nutritional quality of school meals in France: Impact of guidelines and the role of protein dishes. Nutrients, 2018, 10, 205; DOI: 10.3390/nu10020205

 

Référence

Poinsot, R., Vieux, F., Maillot, M. et Darmon, N. Number of meal components, nutritional guidelines, vegetarian meals, avoiding ruminant meat: what is the best trade-off for improving school meal sustainability?. Eur J Nutr (2022). DOI : https://doi.org/10.1007/s00394-022-02868-1

CP-Cantines-scolaires-durablespdf - 861.80 KB

Service Presse INRAE

Contact scientifique

Nicole Darmon UMR MOISA (Montpellier Interdisciplinary center on Sustainable Agri-food systems)

Le centre

Le département

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