illustration  Pascale Chavatte-Palmer, experte des interactions physiologiques entre la mère et le fœtus
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Agroécologie 5 min

Pascale Chavatte-Palmer, experte des interactions physiologiques entre la mère et le fœtus

Pascale Chavatte-Palmer est directrice de recherche en biologie du développement et de la reproduction. De la santé des clones aux travaux sur la programmation fœtale, pionnière sur tous les fronts, pétillante, enthousiaste et pleine de projets, elle s'est imposée comme spécialiste en reproduction animale appliquée au secteur équin et à la santé humaine. Son secret? La curiosité, le travail, la confiance et beaucoup de persévérance, moteurs d'un parcours où chaque nouvelle rencontre est un trésor.

Publié le 25 septembre 2019

Le pouvoir de l'audace, la magie des rencontres

Devenir vétérinaire était une vocation pour Pascale Chavatte-Palmer. Depuis sa plus jeune enfance, sa décision était prise : elle soignerait des chiens. Adolescente, elle ne se doutait pas encore que son passage au collège international de Fontainebleau allait lui apporter d'autres ouvertures et en particulier un goût certain pour le voyage et les ambiances internationales. Bilingue français-anglais en fin de 3ème, elle intègre le lycée international de Saint-Germain-en-Laye. C'est dans cet environnement qu'elle découvre un monde pluriel, des invitations à l'escapade et à voler de ses propres ailes. Gardant son cap, elle entre avec succès à l'école nationale vétérinaire d'Alfort, et réalise son premier stage en expérimentation animale sur le centre Inra de Jouy-en-Josas.

Un goût certain pour le voyage et les ambiances internationales

C'est ensuite chez le vétérinaire de son grand-père, à la Roche-sur-Yon, qu'elle découvre la médecine du cheval. "Puisque tu fais de la course à pied, je vais te montrer les trotteurs" lui avait annoncé son maitre de stage, et il lui offrit à son départ un ouvrage du Dr Edouard Pouret, considéré aujourd'hui comme l'un des pionniers dans le domaine de la médecine vétérinaire équine. Ce cadeau la conduit à approfondir le sujet en lisant les écrits du célèbre Dr Peter Rossdale, spécialiste en reproduction et néonatalogie, fondateur d'une clinique équine de grande renommée à Newmarket en Angleterre. Plus rien ne compte alors que le projet de le rencontrer. En 1989, pour terminer sa dernière année d'école vétérinaire, grâce aux recommandations d'Eric Palmer, chercheur Inra sur la reproduction du cheval, elle part en stage chez le britannique. Leur rencontre est de l'ordre du coup de foudre, une forte connivence s'installe entre eux : elle veut tout apprendre, il veut tout lui transmettre.

Avec la plus grande bienveillance, son mentor lui enseigne les réalités du terrain, de la reproduction des juments jusqu’au poulinage et aux soins aux poulains, et l’initie à la compréhension des mécanismes physiologiques, au diagnostic, et à la recherche. Dans ce riche environnement, de nouvelles rencontres l'amènent à se spécialiser aux Etats-Unis où elle se forge une solide expérience sur la reproduction de tous types d'animaux, avant de revenir en Angleterre, à Cambridge, pour y accomplir, de 1992 à 1995, ses recherches de doctorat sur le thème de la maturation fœtale chez le cheval. Pendant cette période, elle rencontre à plusieurs reprises le Professeur David Barker, qui fut le premier à développer le concept de programmation fœtale, selon lequel des facteurs environnementaux qui agissent pendant la période fœtale et périnatale ont un effet sur le métabolisme et sur le développement de maladies à l'âge adulte.

L'aventure des clones, des copies pas si conformes

Les rencontres, les projets, les voyages ramènent Pascale Chavatte en France, où elle est recrutée sur une mission de recherche/développement à l'Institut du Cheval. La recherche pure lui manque : elle quitte l’institut du cheval pour un stage post-doctoral lui permettant de compléter son travail de thèse. Une nouvelle aventure qui l'amène de nouveau sur le chemin du chercheur Eric Palmer, qui s'apprête à prendre la direction de l'étalonnage national des Haras Nationaux.  Ils se marieront quelques années plus tard. Le parcours de la jeune vétérinaire, déjà très riche en expériences, se stabilise avec son recrutement comme Maître de Conférences en reproduction des animaux domestiques à AgroParisTech.

Elle analysera avec ses collègues les causes des succès et des échecs du clonage.

Elle est rattachée pour sa recherche au laboratoire de Biologie du Développement dirigé par Jean-Paul Renard, directeur de recherche Inra, à l'origine du premier mammifère cloné en France, qui confie l’étude du développement des animaux clonés pendant la gestation et en période post-natale à Pascale. Elle analysera avec ses collègues les causes des succès et des échecs du clonage, développant des méthodes de diagnostic échographique des pathologies liées au clonage et démontrant le rôle essentiel du placenta dans ces pathologies. Pascale émet alors l’hypothèse que certains effets du clonage pourraient être dus à la programmation fœtale par le biais des anomalies placentaires. En 2006, Pascale Chavatte-Palmer postule au concours de chargé de recherche de l'Inra et intègre le laboratoire de Biologie du Développement et de la Reproduction.

A la conquête d'un nouveau front : la programmation fœtale des maladies de l'adulte

Pascale Chavatte-Palmer prend rapidement la direction d’une équipe avec pour projet de mettre à profit l’expertise de l’unité de recherche sur les animaux domestiques pour développer des modèles animaux non-rongeurs de programmation fœtale.  Elle crée un modèle de surnutrition lipidique maternelle chez le lapin, démontre l’effet de la nutrition maternelle sur la survenue de maladies chroniques chez les descendants à l'âge adulte et étudie les mécanismes mis en jeu chez l’embryon (avec l’aide de Véronique Duranthon) et dans le placenta. Le rattachement de l’unité au projet PremUp (fondation pour la grossesse et la prématurité) favorise la reconnaissance de l'équipe par le milieu médical. Avec des équipes médicales, de nouveaux modèles de retard de croissance intra-utérin sont mis au point chez le lapin et l’ovin.

De plus, des outils innovants en imagerie foeto-maternelle par écho-Doppler sont développés. Avec l’arrivée de spécialistes en épigénétique au sein de l’unité, l'équipe se scinde en deux groupes, l'un plus orienté sur l'épigénétique, et l'autre sur le thème "Placenta, environnement et programmation des phénotypes" dont Pascale Chavatte-Palmer prend la direction. De rencontres en projets, elle s'engage dans de nouvelles thématiques telles que l'effet de la pollution sur le développement fœtal et chez les descendants, en lien avec Rémy Slama, épidémiologiste à l'Inserm. Loin d'abandonner ses premières amours pour le cheval, la vétérinaire poursuit en parallèle ses investigations équines grâce aux soutien et financements de l'Institut français du cheval et de l'équitation.

Chercheuse passionnée, leader affirmé

Stimulée par les nouveaux challenges, vive et pleine de projets, Pascale Chavatte-Palmer est sur tous les fronts, en permanence. En ferait-elle un peu trop? Oui à n'en pas douter, mais c'est de ce fonctionnement qu'elle tire son énergie et son enthousiasme. En 2012, avec d'autres collègues chercheurs et médecins, elle fonde la Société francophone pour la recherche et l'éducation sur les Origines Développementales Environnementales et Epigénétiques de la Santé et des Maladie (SF-DOHaD). Depuis janvier 2019, elle préside la société internationale de technologie de l'embryon (IETS), honneur qui lui revient après une implication importante dans des travaux d'expertise sur la santé des clones. Les connaissances sur la programmation fœtale apportent des éléments à de nombreuses questions de société et offrent des perspectives intéressantes pour l'élevage.

Au fur et à mesure que le champ de la thématique s'élargit Pascale Chavatte-Palmer prend de la hauteur, se positionne en leader dont l'objectif est de rassembler les communautés qui, ensemble, peuvent défricher de nouveaux sujets et résoudre de nouvelles questions de recherche dans le domaine de la programmation métabolique. C'est dans cet esprit qu'elle se prépare à ses futures fonctions de direction de la nouvelle unité mixte de recherche BREED, pour Biologie de la Reproduction, Environnement, Epigénétique et Développement.  Les nouveaux sujets foisonnent déjà dans l'esprit pétillant de cette pionnière, aussi douée pour saisir les opportunités que pour les transformer en succès. Ses projets collatéraux ? La poursuite de ses activités de recherche équine, et une plus grande implication dans les réflexions sur les politiques de santé publique. Cette nouvelle aventure ne fait que commencer, motivée par la conviction qu'il est urgent de se pencher sur l'évolution future de notre capital santé et de celui de nos animaux, dans un contexte bouleversé par les effets et par les défis du changement climatique.

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Christine Jez Rédactrice

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