Biodiversité 2 min

Parler aux chevaux comme on parle aux jeunes enfants

COMMUNIQUE DE PRESSE - Pour s’adresser à un animal, de nombreuses personnes adoptent instinctivement une manière de parler qui est proche de celle que l’on adopte pour parler à un jeune enfant : le ton de la voix est plus aigu et les intonations exagérées. Il en va de même pour beaucoup de cavaliers avec leurs chevaux. Mais ces animaux sont-ils sensibles à cette façon de parler ? C’est la question à laquelle ont répondu les éthologues d’INRAE et de l’IFCE. Leurs résultats, publiés le 18 mars dans Animal Cognition, montrent que les chevaux sont plus attentifs et semblent mieux comprendre nos intentions lorsqu’on leur parle ainsi. Cette méthode est donc à intégrer par les cavaliers et les éleveurs dans leur relation avec les chevaux pour faciliter les interactions quotidiennes et améliorer le bien-être de ces animaux.

Publié le 22 mars 2021

illustration Parler aux chevaux comme on parle aux jeunes enfants
© B. Lemaire - IFCE

Le « mamanais » ou « parentais » est le nom donné, en psychologie, à la manière dont les parents s’adressent à leurs bébés. Cette façon de parler aux jeunes enfants a été très étudiée et on sait qu’elle a de multiples vertus en favorisant notamment la relation et en stimulant certains apprentissages. Ce langage se caractérise par l'usage d'une voix plus aigüe, la répétition des mots et la variation des sonorités. Il a aussi une composante émotionnelle positive. Certains animaux sont aussi réceptifs à cette façon de parler, que l’on nomme chez eux le « pet-directed speech », ou PDS. C’est le cas des primates ou des chiens : l’humain capte et retient mieux leur attention grâce au PDS et les animaux ont alors de meilleures performances pour apprendre. En parallèle, de nombreuses études ont démontré que les chevaux sont très sensibles aux émotions humaines. L’équipe d’INRAE et de l’IFCE avait déjà démontré qu’ils sont capables de reconnaitre les expressions sur des photographies de visage humain, et qu’ils sont plus nerveux face à une expression de colère et plus détendus face à une expression de joie. Mais le PDS n’avait jamais été étudié chez les chevaux. Après une enquête préliminaire sur les réseaux sociaux auprès de 845 cavaliers et propriétaires de chevaux, il s’avère que 93 % d’entre eux parlent régulièrement de cette façon à leurs chevaux, mais que seuls 44 % pensent que les animaux y sont sensibles.

Les chevaux sont plus calmes et attentifs lorsqu'on leur parle comme à des jeunes enfants.

Pour évaluer l’impact de cette façon de parler sur les chevaux, les éthologues ont mené deux séries de tests avec 20 chevaux qui n’y avaient jamais été exposés. Lors d’un premier test, chaque cheval était individuellement caressé par l’expérimentateur qui lui parlait soit en utilisant le PDS, soit en utilisant un langage neutre (comme celui que l’on utilise entre adultes). Résultat : lorsqu’on s’adresse à eux en utilisant le PDS, les chevaux répondent plus favorablement, ils sont plus calmes, regardent davantage l’expérimentateur et répondent aux gestes de pansage de l’expérimentateur en miroir (ils frottent le bout de leur nez contre lui en cherchant à le toiletter en retour), gestes qu’ils ne font pas si on s’adresse à eux dans un langage adulte neutre.

Dans le second test, l’expérimentateur a cherché à communiquer au cheval une information :  la localisation d’une récompense alimentaire. En éthologie, on appelle cela la communication référentielle. L'expérimentateur se place face au cheval avec devant lui deux seaux fermés, un seul contenant de la nourriture. Il désigne avec son bras le seau que le cheval doit choisir pour obtenir la récompense en s’adressant à lui soit en utilisant le PDS, soit en utilisant un langage neutre. Lorsque l’expérimentateur parle de façon neutre, les chevaux choisissent un seau au hasard. En revanche, lorsque l’expérimentateur parle en PDS, ils choisissent préférentiellement vers le seau qui leur a été indiqué. Le PDS capte donc l’attention des chevaux et les aide à mieux comprendre les intentions et à suivre les instructions de l’expérimentateur pour réussir la tâche demandée.

enfant donnant de la paille à un cheval
© M. Guillamot

Cette étude montre que cette façon de parler aux jeunes enfants, que l’humain a tendance à utiliser instinctivement avec certains animaux, facilite effectivement la communication entre humains et chevaux dans les interactions de tous les jours (pansage, travail…). Cela peut contribuer à améliorer le bien-être de ces animaux très sensibles aux émotions humaines. Des études sont actuellement en cours pour approfondir les connaissances sur les interactions émotionnelles entre humains et chevaux, tant pour améliorer le bien-être des animaux que celui des humains dans différents cadres, comme l’équitation ou l’équithérapie.

CP-Parler-chevaux-enfants-pdf - 761.57 KB

Service presse INRAE

Contact scientifique

Léa Lansade UMR Physiologie de la Reproduction et des Comportements (INRAE, CNRS, Université de Tours, IFCE)

Le centre

Le département

En savoir plus

Société et territoires

Vivre et travailler avec les chevaux

Hier, serviteur docile, aujourd’hui, compagnon de nos loisirs, le cheval est depuis longtemps lié à l’homme. Des liens que Vanina Deneux, doctorante Inra, analyse au prisme des sciences humaines et sociales, investissant plus particulièrement la notion de travail. Au gré de ses questions/réponses, elle décrit des relations qui se sont continuellement ajustées aux époques et qui doivent désormais composer avec de nombreux enjeux – éthiques, socio-économiques… pour perdurer.

16 janvier 2020

Biodiversité

Les chevaux experts en reconnaissance faciale

COMMUNIQUE DE PRESSE - Jusqu’alors, on pensait que les chevaux nous reconnaissaient davantage par notre odeur, notre voix ou notre comportement. Des scientifiques de l’unité Physiologie de la reproduction et des comportements (INRAE, CNRS, Université de Tours, IFCE) viennent de démontrer qu’ils sont en réalité capables de nous reconnaître sur la seule base de la photographie de notre visage. Mieux : ils se souviennent de nos visages plusieurs mois après les avoir vus. Ces résultats sont publiés dans Scientific report le 14 avril 2020.

31 mars 2020

Agroécologie

Bien-être animal : humains, objets ou leurs congénères, les porcelets nous disent ce qu’ils préfèrent

COMMUNIQUE DE PRESSE - Surprise, peur, joie ou stress, les humains ne sont pas les seuls à exprimer leurs émotions par la voix. En étudiant les grognements des porcelets, une équipe de recherche INRAE a pu évaluer leur état émotionnel, suscité par leurs congénères, des humains ou des objets manipulables. Résultat : si les porcelets ont une préférence pour leurs congénères, l’humain qui s’occupe d’eux est une véritable source d’apaisement, bien plus que les objets manipulables généralement utilisés en élevage. Ces travaux, qui ont pour objectif de comprendre comment favoriser le bien-être des animaux en élevage font l’objet de deux publications dans Scientific reports et Frontiers in Veterinary Science.

27 novembre 2020