Biodiversité 3 min

Mieux comprendre les populations d’animaux sauvages grâce aux nouvelles technologies

Grâce à des colliers équipés de GPS et au séquençage de l’ADN, les chercheurs du laboratoire « Comportement et Ecologie de la Faune Sauvage » (CEFS) d’INRAE Occitanie-Toulouse ont suivi de près une population de chevreuils. Mieux comprendre leurs comportements et leurs adaptations face aux changements de leur environnement donnent des pistes pour la conservation d’autres espèces. Ces travaux sont publiés dans Journal of evolutionary biology et dans la revue Molecular ecology resources.

Publié le 16 décembre 2020

illustration Mieux comprendre les populations d’animaux sauvages grâce aux nouvelles technologies
© INRAE

Pour mieux les préserver, il est important de comprendre comment les populations d’animaux sauvages s’adaptent, ou pas, aux changements de leur environnement. Cela nécessite de comprendre si ces adaptations sont d’origine génétique ou environnementale mais aussi de suivre l’évolution de populations d’animaux sauvages dans leurs mouvements, qui sont de véritables interfaces entre les individus et leur environnement.

Grâce aux nouvelles technologies, les chercheurs de l’unité de recherche Comportement et Ecologie de la Faune Sauvage (CEFS) ont levé deux freins majeurs : la difficulté à suivre des animaux sauvages et le besoin d’avoir des informations génétiques sur un grand nombre d’individus.

Des capteurs GPS, embarqués sur des colliers, ont permis de suivre une population de 334 chevreuils sauvages. Tandis que les technologies de séquençage de l’ADN à haut débit ont fourni des informations génétiques précises.

« Nous avons calculé l’apparentement génomique de cette population de chevreuils pour laquelle aucun pedigree n’était disponible, explique Laura Gervais, auteure de cette étude. Grâce à 15.000 marqueurs génétiques, nous avons pu calculer des héritabilités fiables et robustes, sans avoir besoin de génome de référence. Cela démontre la possibilité d’étudier le potentiel évolutif des populations sauvages ». Cette connaissance de la diversité génétique des populations permet de comprendre si les populations peuvent persister et répondre face à des pressions de sélection tel que des modifications dans le climat, la disponibilité en nourriture ou en prédateurs. Il est alors possible de savoir si cette réponse se fait par modification lentes de générations en générations des caractères héritables ou plutôt par un ajustement rapide et réversible des caractères.

Des populations qui s’adaptent aux changements de leur environnement

 

Grâce aux GPS, les chercheurs ont pu suivre les chevreuils et comprendre comment ils trouvaient à manger et évitaient les dangers, par exemple à proximité des routes. « Nous avons estimé des héritabilités de ces comportements allant de 19 à 71%, ce qui indique que ces comportements sur les déplacements et l’utilisation de l’espace peuvent être transmis à la génération suivante », indique Laura Gervais. Les chercheurs ont également montré, qu’en cas de changements dans leur milieu de vie, la moyenne de ces comportements pouvait changer de 1,1 à 2,4%. « Ce qui indique que des populations d’animaux sauvages auraient le potentiel de répondre aux changements environnementaux, par de petits mais transmissibles variations de leurs comportements de déplacement », traduit la scientifique.

Ces études sont une première étape dans la meilleure compréhension de l’impact des activités humaines sur le devenir des populations de chevreuils et, plus globalement pour la conservation des espèces sauvages, où le nombre d’individus et le temps pour agir sont faibles. Une des prochaines étapes sera d’estimer les différentes sources de pressions de sélection qui pèsent sur ces populations. Cette approche sera faite en collaboration avec les chasseurs, afin d’étudier quels impacts pourraient avoir la chasse sur le comportement des chevreuils. La sélection par la chasse de certains types de comportements pourrait amener à faire évoluer le compromis entre l’évitement du danger (proximité aux infrastructures) et l’acquisition de nourriture (présence dans les prairies/cultures) chez le chevreuil.

 

 

 

 

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