Agroécologie 5 min

Les maths au service de l’élevage : détection précoce des anomalies de rythme d’activité de vaches laitières dans un troupeau

En appliquant des outils de Machine Learning à des données obtenues à l'aide de capteurs de positionnement sur des vaches laitières, les chercheurs ont développé une méthode permettant de détecter 90 à 100 % des anomalies dues à un problème de santé, souvent un à deux jours avant les signes cliniques détectables par l’éleveur, ainsi que 60 à 70 % des anomalies dues à un stress.

Publié le 21 janvier 2021

illustration Les maths au service de l’élevage : détection précoce des anomalies de rythme d’activité de vaches laitières dans un troupeau
© Bruno Meunier

Tout comme les êtres humains, les animaux diurnes sont actifs le jour et se reposent la nuit. Ce rythme est altéré lors de stress ou de maladie (souvent avant l’apparition des signes cliniques). Identifier de telles perturbations pourrait aider les éleveurs à intervenir très rapidement (par ex., isoler l’animal, le traiter) ou au besoin les inciter à rechercher des signes complémentaires pour identifier la cause du trouble.
La détection des perturbations du rythme d'activité nécessite des observations en continu. Grâce au développement de l’élevage de précision, des capteurs sont maintenant disponibles pour enregistrer 24h/24 l'activité des animaux. Cependant, il reste difficile de détecter exactement le moment où le rythme commence à être perturbé. La thèse de Nicolas Wagner, cofinancée par le département Phase et l’Université Clermont Auvergne, avait pour but de proposer une méthode permettant de détecter des anomalies de rythme d’activité en lien avec un état de maladie, de stress, ou un événement lié à la reproduction (chaleurs, vêlage).

Pour ce travail, des données issues de capteurs de positionnement de vaches pour estimer leur activité (se repose, est debout, mange) ont été utilisées. Les chercheurs ont ainsi constitué 4 jeux de données de fermes commerciales ou expérimentales, avec un total de 120 000 jours - vaches pour lesquelles ils avaient accès aux enregistrements de tous les événements, sanitaires ou autres. Il fallait concevoir une méthode qui puisse permettre de classer le rythme observé un jour donné pour une vache donnée, comme normal ou anormal. Le rythme normal correspond à un jour sans événement particulier et le rythme anormal à un jour où la vache a été malade, perturbée (par exemple par un changement de parc), en chaleurs ou en train de mettre bas.
Des algorithmes récents de Machine Learning ont été testés avant que soit développée une méthode adaptée à des séries temporelles qui évoluent de façon rythmée. En utilisant la transformée de Fourier pour modéliser les variations d’activité au cours de la journée, il était possible de comparer les modèles de deux séries de 24 h
: une différence supérieure au seuil défini mathématiquement génère une anomalie.

Exemple de 36 h d’activité d’une vache. Ligne continue : niveau d’activité observé. Lignes pointillées : transformée de Fourier des premier (en noir) et dernier (en rouge) segments de 24 h. Une distance élevée entre les deux transformées génère une anomalie.

Cette méthode a produit moins de 20% de fausses alertes. Elle a permis de détecter 90 à 100% des anomalies dues à un problème de santé ou à des chaleurs et ce, un à deux jours avant la détection des signes cliniques. La méthode a permis également de détecter 60 à 70% des anomalies dues à un stress.
Cette détection permettra à terme d’aider les éleveurs à prendre rapidement des décisions pour intervenir le plus tôt possible : rechercher des informations complémentaires pour diagnostiquer le problème, isoler l’animal, voire le traiter, et ce sans attendre l’apparition de troubles cliniques.

Le développement de la méthode se poursuit en intégrant d’autres notions mathématiques, telles que la « logique floue »*, qui semble prometteuse pour diminuer nettement le nombre de fausses alertes. Il restera ensuite à mieux identifier les spécificités liées aux différents troubles afin de distinguer maladie, stress, vêlage, chaleurs. Les chercheurs sont en relation avec deux entreprises d’élevage de précision qui pourraient utiliser cette méthode pour affiner les alertes transmises aux éleveurs.

*l’idée est de déterminer la véracité d’une proposition (ici : l’animal est perturbé) par un nombre compris entre 0 et 1. La logique floue s’inspire du raisonnement humain qui repose souvent sur des données incomplètes.

Sylvie André

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