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Extraire du nickel avec des plantes
Extraire du nickel avec des plantes, c’est possible avec le développement du concept de l’agromine, qui inclut une plante capable d’accumuler le nickel dans ses parties aériennes et un procédé d’extraction du nickel à partir des plantes. Ce type d’extraction est viable sur le plan économique et plus vertueux sur le plan environnemental que les procédés miniers classiques.
Publié le 04 mai 2020
Le nickel, une ressource nécessaire mais limitée
Le nickel est utilisé dans environ 3 000 alliages, représentant plus de 250 000 applications, dans l’équipement et l’aéronautique en particulier. Associé à l’acier, il est à la base de l’acier inoxydable, l’inox. On le trouve aussi dans des électrodes, des piles, des batteries, et dans les pièces de monnaie (pièces de 1 et 2 euros). L’industrie minière exploite les minerais dont la teneur en nickel dépasse 1,3%. Mais les gisements les plus riches ont été épuisés et, alors que la demande mondiale en nickel ne cesse de croître, il devient nécessaire d’exploiter les ressources dites secondaires, gisements aux teneurs plus faibles, déchets industriels ou urbains. C’est ce que permet l’agromine, c’est-à-dire l’utilisation de plantes extractrices de nickel.
Des procédés de culture et d’extraction optimisés
L’Albanie a servi de terrain d’essai pour la mise au point de l’agromine-nickel. On y trouve des sols, dits « ultramafiques », qui contiennent naturellement 100 fois plus de nickel que les sols normaux, et sont par ailleurs riches en fer, cobalt, magnésium. On y trouve aussi une plante, Alyssum murale, qui est capable d’accumuler de grandes quantités de nickel dans ses parties aériennes. La culture de cette plante a été optimisée pour obtenir plus de 10 tonnes de matière sèche par hectare, de laquelle peuvent être extraits jusqu’à 150 kg de nickel. Les conditions de culture sont actuellement améliorées selon les principes de l’agroécologie, dans des rotations comportant des légumineuses et en utilisant des amendements organiques (fumiers, composts).
Une fois récoltées, les plantes subissent un traitement pour extraire le nickel, dont les étapes ont été aussi optimisées au niveau énergétique et environnemental (émissions de GES et stockage de carbone dans les sols). L’analyse de cycle de vie a montré que dans toute la filière d’agromine, la culture des plantes est la phase la plus sensible en termes d’impact environnementaux et climatiques.
Le procédé est actuellement testé à l’échelle du démonstrateur (projet européen Life Agromine).
Différents usages pour l’agromine
Les terrains ultramafiques sont répandus en Europe et occupent plus de 10 000 km2. On en trouve aussi dans des régions tropicales telles que Cuba, la Nouvelle-Calédonie ou l’Indonésie. L’extraction du nickel permet de valoriser ces terrains peu fertiles pour l’agriculture classique.
En France, les terrains ultramafiques ne sont pas très nombreux : il en existe cependant presque 1000 km2 en Corse et de petites surfaces dans les Vosges. L’extraction du nickel vise plutôt à valoriser des terrains contaminés par des activités industrielles, faisant ainsi d’une pierre deux coups : détoxifier les sols et produire du nickel. Un gros projet a été financé en 2012 par la Région Lorraine (projet Lorver) pour valoriser ce que l’on appelle les « délaissés » : friches, sols contaminés, boues, déchets etc. Ainsi, les friches industrielles n’apparaîtront plus comme un handicap, mais comme une ressource.