Biodiversité 5 min
Bruno Fady, le plaisir est dans les gènes
Bruno Fady est directeur de recherche INRAE et directeur adjoint de l'unité de recherches Écologie des forêts méditerranéennes à Avignon (région Provence-Alpes-Côte d'Azur). Ses travaux portent sur la diversité génétique des arbres forestiers, et notamment la structuration dans l’espace des gènes potentiellement impliqués dans l’adaptation au changement climatique.
Publié le 15 septembre 2020
Identifier les mécanismes génétiques impliqués dans l’adaptation
Après une licence en biologie cellulaire et physiologie des plantes, Bruno Fady interrompt ses études durant deux ans afin de suivre sa future épouse qui poursuit les siennes aux États-Unis. À son retour, ses motivations scientifiques ont changé. Il s’oriente vers l’écologie et la génétique, et découvre l’Inra, devenu aujourd'hui INRAE, à l’occasion de son stage de DEA. D’emblée, il est séduit par la préoccupation de l’Institut à fournir des réponses scientifiques précises aux questions de la société. Il consacre sa thèse de doctorat à l’adaptation du sapin de Grèce aux conditions méditerranéennes françaises. Un thème en totale adéquation avec l’une des préoccupations de l’Inra et des gestionnaires forestiers en 1990 : rechercher des essences forestières alternatives pour diversifier et augmenter la productivité des forêts méditerranéennes françaises, sensibles aux incendies et aux ravageurs. Bruno Fady obtient son doctorat en génétique et écologie de l’Université Paul Cézanne Aix-Marseille, et intègre l’Inra en 1992.
La diversité génétique, carburant du moteur de l’évolution
Si ses recherches continuent à concerner l’amélioration génétique, très vite, il se montre intéressé par la conservation de la diversité génétique que l’on trouve dans les forêts naturelles, entre individus, et entre les populations. « La diversité est le carburant qui alimente le moteur de l’évolution et qui permet l’adaptation, notamment au changement climatique », souligne Bruno Fady. Ces problématiques sont aujourd’hui au cœur des travaux menés par l'unité de recherche Écologie des forêts méditerranéennes (URFM), dont il est directeur-adjoint. Il étudie notamment le site expérimental du Mont Ventoux, afin de déterminer si les forêts magnifiques qui s’y trouvent sont vouées à disparaître à l’horizon 2100 ou si leur diversité génétique va leur permettre de s’adapter. Que ce soit seules, ou avec un coup de pouce des scientifiques, notamment grâce à la génétique. « Nous cherchons à corréler la variabilité génétique d’une population avec les conditions environnementales dans lesquelles elle pousse. Notre objectif, difficile, c’est, à terme, d’identifier les gènes, les caractères et les mécanismes qui sont impliqués dans l’adaptation au climat », précise Bruno Fady. Ses recherches ne se limitent pas au Mont Ventoux. « En région méditerranéenne, il existe une grande diversité biologique entre les espèces. Nous tentons de décrire de quelle façon leur diversité génétique, issue d’une histoire complexe, se structure dans l’espace. Cette description biogéographique va nous permettre de prendre des décisions en matière de conservation de la diversité génétique », précise Bruno Fady. Et il ajoute : « ces recherches nous donnent des informations sur le passé, qui nous permettent de comprendre le présent, et nous aident à prédire le futur. Sans ces connaissances, nous ne pouvons proposer de stratégies de gestion aux décideurs politiques ou gestionnaires ».
GenTree : associer conservation et utilisation durable des ressources génétiques forestières
Depuis mars 2016, Bruno Fady coordonne le projet de recherche européen GenTree (Programme Horizon 2020) dont il assure la responsabilité administrative et scientifique. Réunissant pour quatre ans 22 partenaires dont l’Inra, ce projet a pour objectif de fournir au secteur forestier des méthodes et des outils lui permettant de mieux conserver et utiliser la diversité génétique. « J’attache une grande importance à ce projet. Il vise à relier les approches de conservation et d’utilisation durable de la diversité génétique pour mieux gérer les forêts au niveau européen dans un contexte de modification profonde du climat et de la demande sociétale. » Et de conclure : « nous réussirons à adapter nos forêts dans ce monde qui change si ceux qui œuvrent pour la conservation de la biodiversité acceptent aussi d’utiliser des méthodes issues de l’amélioration génétique, et si ceux qui cherchent à rendre les forêts plus performantes prennent aussi en compte ce qui se passe dans le domaine de la conservation, loin des belles forêts de production ».
- 60 ans, marié, 3 enfants
- 1982, Licence de Biologie cellulaire et physiologie, Université Paris 6, France
- 1986, Maîtrise en Écologie, Université Aix-Marseille 3, France
- 1990, Doctorat en Écologie et génétique, Université Aix-Marseille 3
- 1991, Post Doc, Institute of Forest Genetics, USDA, Californie, USA
- 1992, Ingénieur de recherche INRAE
- 2000, Chargé de recherche INRAE
- Depuis 2007, Directeur de recherche INRAE
- Depuis 2014, Directeur adjoint de l'unité de recherche Écologie des forêts méditerranéennes (URFM), INRAE Provence-Alpes-Côte d'Azur