Biodiversité 4 min

Terrains dégradés des stations de ski : la piste locale pour restaurer la biodiversité

Le développement des territoires de montagne s’accompagne de nombreux aménagements dont la construction des pistes de ski. Des aménagements qui peuvent fragiliser voire détruire le sol et le couvert végétal des espaces montagnards. Que ce soit pour lutter contre l’érosion, réhabiliter le paysage ou préserver la biodiversité, ces espaces doivent être restaurés. Face à des techniques écologiquement peu satisfaisantes, INRAE contribue à la mise en place d’une filière de revégétalisation qui utiliserait des semences locales pour restaurer le milieu montagnard alpin.

Publié le 12 octobre 2017

illustration Terrains dégradés des stations de ski : la piste locale pour restaurer la biodiversité
© INRAE - Sébastien De Danieli

La France est l’un des pays d’Europe qui possèdent le plus grand nombre de stations de ski. Autant de pistes aménagées qui refaçonnent les sols et les paysages montagnards. Ces aménagements ont rapidement imposé des travaux de revégétalisation pour protéger les sols abîmés contre l’érosion, restaurer un paysage proche de celui d’origine durant la période estivale et ainsi préserver l’attrait touristique. Il est également important de redonner à ces espaces toute leur richesse écologique et leurs fonctionnalités agronomiques (pâturage de qualité, notamment). Á titre d’exemple, les stations de ski des Alpes françaises, pour qui la restauration des terrains dégradés est à la fois une nécessité technique et économique (tourisme d’été, activité agricole), ont revégétalisé plus de 600 hectares par an de 2008 à 2017. Des travaux de végétalisation qui se chiffrent à environ 5 000 euros par hectare.

Des semences d’origine locale pour maintenir la diversité écologique

Dans le cas des Alpes françaises, les travaux de revégétalisation sont aujourd’hui essentiellement effectués à partir de mélanges de graines issues de la multiplication d’espèces non locales (autres régions, voire autres continents…) et peu diversifiées. Des semences qui dans certains cas remplissent bien leur rôle vis-à-vis des enjeux de lutte contre l’érosion et de la restauration paysagère mais beaucoup moins du point de vue écologique. C’est pourquoi des expérimentations sont menées depuis quelques années pour utiliser des semences  d’origine locale, récoltées dans la zone géographique des espaces à revégétaliser et dans des milieux correspondant aux objectifs de revégétalisation (pelouses, prairies…). « Les semences locales présentent deux gros atouts : elles sont par essence adaptées et résistantes aux conditions extrêmes d’altitude et donc plus pérennes et, par ailleurs, elles permettent de maintenir la diversité écologique propre aux écosystèmes montagnards. À titre de comparaison, les semences du commerce sont souvent constituées de quatre à douze espèces, alors qu’une prairie de montagne peut en contenir jusqu’à 40 par mètre carré », explique Thomas Spiegelberger, chercheur du centre INRAE Auvergne-Rhône-Alpes Lyon.

Vers une filière de revégétalisation en circuit « ultra court »

Revégétalisation de pistes de ski
Revégétalisation de pistes de ski à l'aide de semences locales

Forts des résultats encourageants d’expérimentations menées notamment dans les Alpes autrichiennes et les Pyrénées françaises, des chercheurs du centre INRAE Auvergne-Rhône-Alpes Lyon se sont intéressés à une technique qui permettrait de conduire une revégétalisation des espaces alpins à partir d’espèces locales et qui soit à la fois efficace et économiquement rentable. « Dans le cadre du projet AlpGrain1, nous avons démontré la faisabilité d’une méthode qui consiste à récolter les graines locales par fauchage ou brossage, d’une prairie par exemple, et à les redéposer directement sur le terrain dégradé », explique Thomas Spiegelberger, responsable du projet à INRAE. Le projet Sem’lesAlpes2 a pris sa suite, et s’est achevé en décembre 2018. Ce projet a permis de mener une étude de marché pour préciser la demande en semences, d'identifier les potentialités du marché et de constituer un réseau de partenaires. Pendant la démarche, les différents acteurs - aménageurs de stations de ski, producteurs (semenciers, agriculteurs) et chercheurs – ont collaboré et ont mené plusieurs opérations d’ensemencement sur 8 sites pilotes répartis sur le Massif alpin. « Ce test grandeur nature a permis de tester différentes méthodes de production de semences et de réaliser une cartographie des zones de récolte et d’utilisation pour pouvoir mettre en correspondance les zones de prélèvement de semences et les zones d’utilisation en fonction des milieux à restaurer », explique Alice Dupré la Tour, ingénieure d’étude à INRAE qui a travaillé sur le projet. En outre, le Conservatoire Botanique National Alpin, partenaire du projet, a identifié une liste d’espèces qui s’avèrent les mieux adaptées à cette filière locale de revégétalisation. De nombreux outils sont donc déjà disponibles pour les acteurs souhaitant se lancer dans l’aventure.

Sem’ les Alpes, des semences d’origine locale pour la restauration de milieux ouverts en montagne alpine

Le guide Sem’lesAlpes est destiné à tous les acteurs impliqués dans des projets de revégétalisation de milieux d’altitude a pour objectif de partager les expériences et les résultats issus du projet et d’apporter aux acteurs des outils pour ajuster leurs itinéraires techniques de revégétalisation.

Le guide rassemble : 

 - les méthodes de production et d’approvisionnement des semences locales, avec une synthèse du contexte économique et réglementaire de la filière, 

 - des fiches descriptives sur les travaux des revégétalisation effectués sur les sites pilotes du programme, avec les résultats observés les années suivantes, 

 - une liste d’espèces indigènes identifiées dans le cadre du projet pour former des mélanges de restauration des milieux ouverts en montagne alpine.

1 - Alp’Grain (2013-2015), cofinancé par l’Union Européenne (FEDER), Interreg ALCOTRA
2 - Sem’lesAlpes (2016-2018), financé par l’Union Européenne (FEDER) 

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