Changement climatique et risques 3 min

Les plantes au rythme des saisons Guide d'observation phénologique des plantes

Cet ouvrage invite le grand public à découvrir les rythmes saisonniers de la flore qui nous entoure et l’évolution de ses cycles dans le contexte du changement climatique. Il propose également de se familiariser avec la science complexe qu’est la phénologie.

Publié le 09 septembre 2017

illustration Les plantes au rythme des saisons Guide d'observation phénologique des plantes
© INRAE

Le changement climatique bouleverse les rythmes saisonniers de nombreuses espèces. Bourgeonnement, floraison, maturation des fruits, coloration des feuilles, autant d'événements clés de la vie d'un arbre dont le calendrier est perturbé. Ce guide vise à faire découvrir au plus grand nombre la phénologie, science qui étudie le cycle de vie annuel des plantes en fonction des conditions climatiques. Un domaine de recherche de plus en plus mis en lumière dans le contexte du changement climatique. 

Le lecteur pourra s’initier à l’observation phénologique avec 79 espèces de plantes communes (hêtre, mélèze, pêcher, anémone...). Il y trouvera pour chaque espèce : des critères d’identification illustrés de très belles aquarelles, l’écologie et la répartition de la plante, le calendrier du cycle annuel et les différents stades phénologiques photographiés qui lui permettra ainsi de décrire précisément à partir des plantes observées.  

En mêlant approche artistique, initiant le spectateur au plaisir d’observer, les auteurs visent enfin à encourager les citoyens à rejoindre des programmes de sciences participatives tels que l’Observatoire des Saisons.  

Les auteurs 

La phénologie, une science qui connaît un regain d'intérêt en raison du changement climatique

Le collectif scientifique de l’Observatoire des Saisons et Vincent Badeau, ingénieur de recherche à INRAE de Nancy - Marc Bonhomme, ingénieur de recherche à INRAE de Clermont-Ferrand - Fabrice Bonne, technicien forestier à INRAE de Nancy- Jennifer Carré, responsable du développement des projets en territoire pour Tela Botanica - Sébastien Cecchini, technicien forestier à l’Office national des forêts - Isabelle Chuine, directrice de recherches au CEFE-CNRS, à Montpellier - Catherine Ducatillion, ingénieure de recherche à INRAE, elle dirige le jardin botanique de la Villa Thuret à Antibes - Frédéric Jean, assistant ingénieur à INRAE d’Avignon - François Lebourgeois, maître de conférences à AgroParisTech Nancy  

 

Biotope Editions - 336 pages, juin 2017 - 25 euros

EXTRAITS

Les changements phénologiques dus au changement climatique (…) ont des conséquences importantes sur les chaînes alimentaires, la dynamique des communautés animales et végétales, le fonctionnement des écosystèmes et la répartition géographique des espèces. 

(…)

Les interactions entre espèces au sein des chaînes alimentaires dépendent souvent, de manière étroite, de la taille relative des proies et de leurs prédateurs, donc de leur stade de développement. Un exemple bien connu est l’interaction entre le chêne, la phalène brumeuse (papillon), et la mésange charbonnière. Chaque printemps, vers le mois de mai, la mésange pond ses œufs. Quand ceux-ci éclosent, les poussins sont nourris par leurs parents de jeunes chenilles qui sont sorties de leurs œufs quelques jours auparavant. Ces jeunes chenilles se nourrissent de jeunes feuilles de chênes fraîchement sorties de leur bourgeon à peu près au même moment. Ensuite, les chenilles peuvent manger des feuilles de chênes devenues plus épaisses et coriaces et les oisillons ces chenilles devenues plus grosses. Plus tard, quand les chenilles se transforment en chrysalides, les oisillons ont terminé leur croissance et quittent le nid. Cette courte chaîne alimentaire dépend donc étroitement de la synchronisation des cycles annuels de développement des trois espèces en interaction. Mais le changement climatique est venu perturber cet équilibre. Le chêne fait maintenant ses nouvelles feuilles plus de quinze jours plus tôt. Les chenilles de la phalène brumeuse sortent également de leur œuf environ quinze jours plus tôt. En revanche, la mésange charbonnière n’a pas décalé sa date de ponte de quinze jours. Pour cette raison, quand les oisillons sortent de l’œuf, les chenilles sont déjà trop grosses pour qu’ils puissent les ingérer. Les mésanges n’arrivent pas à nourrir leurs petits de façon optimale, la mortalité au nid augmente et les densités de population de mésange diminuent. Ces phénomènes de désynchronisation du cycle annuel de développement des espèces en interaction forte au sein des chaînes alimentaires se rencontrent actuellement dans tout le règne vivant. Cependant, des phénomènes d’adaptation peuvent apparaître. Ainsi, les mésanges du sud de la France ont avancé leur période de ponte. Les raisons qui ont permis à certaines populations d’avancer leur ponte contrairement à d’autres ne sont pas encore élucidées, mais cet exemple illustre toute la complexité du monde vivant, et tout l’intérêt d’avoir des observations phénologiques pour de nombreuses espèces et de nombreuses situations climatiques différentes. 

(…)

L’importance de la phénologie dans le fonctionnement de la plupart des organismes vivants pluricellulaires, pousse actuellement différentes équipes de recherche à modéliser la phénologie des espèces animales et végétales, afin de pouvoir estimer les conséquences du changement climatique sur la biodiversité et sur le fonctionnement des écosystèmes. Modéliser un organisme ou un système nécessite de bien le connaître. C’est pourquoi de nombreux observatoires et programmes de recherche sur la phénologie ont vu le jour ces dix dernières années dans le monde. Les observations collectées permettent de déterminer quels facteurs environnementaux (température, durée du jour, qualité de la lumière, sécheresse, etc.) sont utilisés par la plante pour initier son développement. Une fois les mécanismes élucidés, ils sont retranscrits mathématiquement pour élaborer des modèles théoriques. Ceux-ci peuvent être utilisés pour établir des projections et pour estimer les dates d’apparition des stades phénologiques, en fonction de scénarios climatiques à venir. Ces modèles prédisent, dans l’état actuel de nos connaissances, que les dates des événements de printemps vont continuer d’avancer au fil des années dans la plupart des régions de France, jusqu’à 20 jours d’ici 2100, avec un réchauffement moyen de l’ordre de 2,6 °C (…) En revanche, dans les régions méridionales, la phase d’avancement pourrait être suivie d’une phase de stagnation puis de recul des dates des événements de printemps, voire une absence de ces événements, dès les années 2050. (…) Le manque de froid, dans le cas le plus méridional, pourrait compromettre la levée de dormance indispensable au processus de floraison et par voie de conséquence la floraison elle-même.