Alimentation, santé globale 6 min

Nitrites dans les charcuteries : état des connaissances sur les impacts santé et les alternatives

NOTE AUX RÉDACTIONS - Cette note de presse fait un point sur l'état des connaissances scientifiques sur l'impact des nitrites et des alternatives.

Publié le 28 mars 2023 (mis à jour : 09 octobre 2023)

illustration Nitrites dans les charcuteries : état des connaissances sur les impacts santé et les alternatives
© Freepik

Les nitrites sont des additifs qui sont utilisés dans les charcuteries pour garantir leur conservation et un haut niveau de sécurité microbiologique. Mais des travaux de recherche, menés notamment par INRAE, ont montré dès 2010 que ces additifs pouvaient avoir un impact négatif sur la santé, notamment concernant le risque de cancer colorectal. Des publications récentes de début 2023, pilotées par l’Inserm et auxquelles ont participé des chercheurs d’INRAE, ont montré également des risques accrus de diabète et d’hypertension liés aux nitrites dans les charcuteries.

Des recherches sont engagées depuis plusieurs années sur le plan national et international pour caractériser les risques, comprendre les mécanismes et réduire l’impact négatif de ces additifs sur la santé des consommateurs, tout en maintenant la sécurité microbiologique de ces produits charcutiers.

Les recherches d’INRAE ont ainsi été citées en appui à la proposition de loi parlementaire n° 4830 relative à l’interdiction progressive des additifs nitrés dans les produits de charcuterie. Cette question de la réduction voire du retrait des nitrites fait l’objet d’un débat public intense depuis plusieurs années, et est parfois l’objet de controverses sur la question de l’ampleur et du rythme de la réduction.

L’objet de cette note est donc de faire un point sur l’état des connaissances scientifiques pour éviter des raccourcis ou des incompréhensions qui nuisent à la qualité du débat sur le sujet, et pour donner des bases scientifiques aux décisions sanitaires qui relèvent de la compétence des pouvoirs publics.

En effet, dans le cadre de la préparation du Plan d’action gouvernemental sur les nitrites dans l’alimentation désormais rendu public, INRAE a porté à la connaissance des pouvoirs publics ses derniers résultats scientifiques portant sur l‘évaluation des effets sur la santé de la diminution et du retrait des nitrites dans une charcuterie cuite standard [1], ainsi que l’effet sur la santé des alternatives actuellement sur le marché.

 

Comme le veut la pratique d’une recherche contradictoire, évaluée par ses pairs, les résultats de ces travaux ont été soumis pour publication dans la revue internationale Npj Food Science dont la notoriété est excellente dans le domaine des sciences et technologies de l’alimentation. En parallèle, et dans l’objectif d’une science ouverte à la société, INRAE a mis les résultats de cette étude à disposition en prépublication le 26 mars 2023 sur le serveur bioRxiv[2] qui fait référence en biologie. La publication dans la revue Npj Food Science est effective depuis le 7 octobre 2023.  Les éléments apportés par cette prépublication soulignent l’intérêt et la faisabilité immédiate de réduire le taux de nitrites autorisé à 90 ppm (ou mg/kg) dans certains produits cuits.

Au-delà de cette première mesure de réduction, l’Institut confirme l’intérêt de poursuivre la réduction significative des nitrites dans les charcuteries, tout en garantissant leur sécurité microbiologique :

  • d’une part les conditions sont requises pour supprimer dès à présent les nitrites dans certains produits de charcuteries fraiches ;
  • d’autre part des recherches menées par nos équipes sont en cours pour trouver des alternatives saines, sûres et validées, permettant, en toute fiabilité, d’aller jusqu’à la suppression des nitrites dans les charcuteries cuites les plus consommées par les Français.

Sur ce sujet, comme sur les autres, INRAE souligne l’engagement constant de ses équipes pour produire des connaissances [3]au meilleur niveau possible dans l’objectif d’améliorer la santé publique des consommateurs, dans une démarche éthique, déontologique et d’intégrité scientifique de ses recherches.

 [1] Le coût total du projet s’élève à 2,4 M€ dont 929k€  apportés par  l’Institut du Porc (IFIP), l’Institut technique de la viande (ADIV), et un consortium d’entreprises (la FICT, Solina, Fleury Michon, Kermene, Aubret, Loste, Sodebo, Sofia BVA, Souchon d’Auvergne, Martinet, Charcuterie Zentz, Serres et Cie, Dat Schaub France, Lallemand, Prosur), soit un financement de la filière professionnelle à hauteur de 38% du montant total.

[2] https://biorxiv.org/cgi/content/short/2023.03.24.531666v1  - La version de la publication revue par les pairs est disponible depuis le 7 octobre 2023 : https://www.nature.com/articles/s41538-023-00228-9.pdf).

[3] Pour l’ensemble de ses travaux de recherche sur les liens entre consommation des charcuteries et santé depuis 2006, les équipes d’INRAE ont été impliquées dans 9 projets avec des partenaires académiques, et 6 projets partenariaux, pour un montant global du financement des recherches sur ce sujet de 4,8M€, dont 1M€ provenant des partenaires économiques, soit 22%.

Questions-Réponses

Les nitrites, les nitrates qu’est-ce que c’est ? À quoi servent-ils ? Que connait-on aujourd’hui de leurs impacts sur la santé des consommateurs ? Existe-t-il des alternatives dans les charcuteries cuites? Voici une synthèse des connaissances sur les enjeux autour des nitrites et des nitrates dans les charcuteries en quelques points clés, à partir des recherches menées par INRAE, l’Inserm et des expertises conduites par l’Anses.

1. Les nitrites, les nitrates, qu’est-ce que c’est ?

Historiquement, le salpêtre composé de nitrate de potassium a été utilisé pour améliorer la conservation des viandes. Plus récemment, les nitrites et nitrates sont utilisés notamment dans les charcuteries sous forme d’additifs alimentaires : ils sont appelés aussi nitrite de potassium (e249), nitrite de sodium (e250), nitrate de sodium (e251) et nitrate de potassium (e252). On les retrouve aujourd’hui dans plus de 15 000 produits emballés sur le marché français et en particulier dans les charcuteries crues (jambon secs, jambon crus…) et cuites (jambon blanc, rillettes, pâtés, saucisses…). Dans les charcuteries, la forme active est le nitrite ; les nitrates peuvent être convertis en nitrites aussi bien dans les aliments que dans l’organisme.

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2. À quoi servent-ils ?

Ces additifs ont été au départ utilisés pour empêcher le développement de bactéries pathogènes telles que les salmonelles ou la listeria et éviter la production de toxines produites causant le botulisme (toxines Clostridium botulinum). Par ailleurs, les nitrites ont aussi la propriété de protéger du rancissement, favorisant ainsi une DLC (date limite de consommation) plus longue. Enfin, sur le plan visuel et olfactif, ils sont à l’origine de la couleur rose des charcuteries cuites.

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3. Quelle est la dose de nitrites autorisée dans la réglementation en Europe et en France ?

Une dose d’incorporation maximum de 150 mg de nitrites par kilo de charcuterie a été fixée par la réglementation européenne. On parle de dose à 150 ppm – partie par million (1 ppm = 1 mg/kg).
En France, les charcutiers français, artisans et industriels se sont engagés de manière volontaire dans le Code des usages de la charcuterie, sous le contrôle de la DGCCRF,  à limiter l’utilisation des nitrites à 120 mg maximum par kilo, soit 120 ppm.

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4. Que sait-on du lien entre nitrites et risque de cancer ?

Dès 2010, les travaux d’INRAE, conduits dans le cadre d’un projet soutenu par l’ANR, ont étudié le rôle du nitrite de sodium dans l’effet de la consommation de charcuteries cuites – celles-ci représentant 30 % des charcuteries consommées en France – sur le risque de cancer du côlon. Ces travaux, rappelés dans la proposition de loi relative à la consommation de produits contenant des additifs nitrés portée par le député Richard Ramos, ont été les premiers à démontrer expérimentalement que la présence des nitrites explique tout ou partie de l’effet de la consommation de charcuteries sur le risque de carcinogenèse colorectale [1].

Concrètement, les chercheurs ont prouvé que les nitrites réagissent chimiquement avec le fer héminique de la viande ou dans notre organisme pendant la digestion. Ils se transforment alors en composés nitrosés, parmi lesquels on trouve notamment les nitrosamines volatiles (des substances classées cancérogènes probables, groupe 2A) et le fer nitrosylé, dont la consommation pourrait être associée à un risque accru de cancer colorectal.

Après ces premiers travaux, les équipes d’INRAE ont compris en 2016 que le fer nitrosylé est un facteur central : sur un modèle animal[2] et sur la base de travaux en épidémiologie sur la cohorte E3N[3] avec l’Inserm, ils ont en effet mis en évidence une association entre fer nitrosylé et risque d’adénome colique[4]. Plus récemment, une étude sur les données de la cohorte NutriNet-Santé a montré des associations entre l’exposition aux additifs alimentaires nitrités et nitratés et des risques plus élevés de cancer de la prostate et du sein, respectivement. Cette étude a également suggéré des liens entre additifs nitrités et risque de cancer colorectal, même si la puissance statistique ne permettait pas des résultats significatifs pour cette localisation de cancer spécifiquement[5].

Sur la base de ces résultats et des autres données de la littérature scientifique, l’Anses[6] a souligné en juillet 2022 que pour diminuer le risque de cancer colorectal, il fallait réduire l’exposition des consommateurs aux nitrites, en réduisant pour certains produits les doses présentes dans les charcuteries, et en soulignant l’importance de respecter les recommandations nutritionnelles (issues du PNNS) en vigueur : la consommation de charcuterie doit être limitée à 150 g par personne par semaine et à 500 g pour la viande rouge. Ces recommandations du PNNS participeraient en effet également à la diminution du risque de cancer colorectal.

Références
1. Santarelli R.L., Vendeuvre J.L., Naud N. et al. (2010). Meat processing and colon carcinogenesis: cooked, nitrite-treated, and oxidized high-heme cured meat promotes mucin-depleted foci in rats. Cancer Prev Res (Phila), 3 (7), 852-864. doi: https://doi.org/10.1158/1940-6207.CAPR-09-0160.
2. Bastide N.M., Naud N., Nassy G. et al. (2017). Red Wine and Pomegranate Extracts Suppress Cured Meat Promotion of Colonic Mucin-Depleted Foci in Carcinogen-Induced Rats. Nutr Cancer, 69 (2), 289-298. doi: https://doi.org/10.1080/01635581.2017.1263745
3. Étude épidémiologique auprès de femmes de la MGEN (Mutuelle générale de l'Éducation nationale) est une étude de cohorte prospective qui suit 98 995 femmes françaises nées entre 1925 et 1950 et avec questionnaires alimentaires réguliers depuis 1990.
4. Bastide N., Morois S., Cadeau C. et al. (2016). Heme Iron Intake, Dietary Antioxidant Capacity, and Risk of Colorectal Adenomas in a Large Cohort Study of French Women. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev. 2016 Apr;25 (4) :640-7. doi: 10.1158/1055-9965.EPI-15-0724.
5. Chazelas E., Pierre F., Druesne-Pecollo N. et al. (2022). Nitrites and nitrates from food additives and natural sources and cancer risk: results from the NutriNet-Santé cohort. International Journal of Epidemiology, 51 (4), 1106–1119, https://doi.org/10.1093/ije/dyac046
6. Anses, 2022. Avis concernant L’évaluation des risques liés à la consommation de nitrates et nitrites. https://www.anses.fr/fr/system/files/ERCA2020SA0106Ra.pdf.

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5. Quels sont les effets de la réduction et de la suppression des nitrites dans les charcuteries cuites sur la santé ?

Au niveau microbiologique, tel que souligné par l’Anses dans son avis de juillet, « plus la réduction de l’emploi des nitrites est importante, plus le risque microbiologique pour les consommateurs augmente », tout en précisant que « les mesures de maîtrise complémentaires à mettre en place par les opérateurs devraient alors être drastiques et/ou plus nombreuses. La faisabilité de leur application et leur efficacité devront donc être évaluées ».

Dans les derniers travaux d’INRAE publiés [7], différentes options de réduction, de substitution ou de suppression des nitrites dans les produits cuits sont étudiées et comparées à la situation de référence (dose de 120 ppm) :

1. La suppression des nitrites augmente effectivement la croissance de listeria et donc le risque microbiologique. Dans le produit, la suppression des nitrites entraîne une disparition des composés nitrosés (fer nitrosylé et nitrosamines non volatiles) et des nitrites résiduels. Dans le modèle animal de carcinogenèse colorectale, la suppression des nitrites bloque complètement la formation du fer nitrosylé et diminue la carcinogenèse colorectale au stade précoce, ce qui était attendu car déjà rapporté en 2010. Toutefois, le retrait entraîne également une peroxydation lipidique (réaction chimique entre le fer héminique et les lipides de la viande). Les travaux de l’unité Toxalim d’INRAE ont largement participé à la démonstration du lien entre peroxydation lipidique et risque de cancer colorectal dans des modèles cellulaires [7]. En lien avec l’augmentation de la peroxydation lipidique, les résultats présentés dans cette publication, obtenus sur modèle animal, suggèrent donc que le retrait simple des nitrites dans les produits cuits sans opérations correctives visant à limiter cette hausse de peroxydation ne permettrait pas d’atteindre la protection optimale du consommateur.

2. La diminution des nitrites à 90 ppm (diminution de 25 % par rapport à la dose actuelle de 120 ppm) permet de maîtriser la croissance de listeria. Dans le produit, la diminution à 90 ppm diminue significativement la dose de nitrites résiduel. La diminution à 90 ppm ne provoque pas une augmentation de la peroxydation lipidique dans le produit et pendant la digestion. Par rapport à la dose de 120 ppm, la dose de 90 ppm diminue très fortement la formation de fer nitrosylé et de nitrosamines non volatiles dans le corps et diminue le risque de carcinogenèse colorectale tout aussi efficacement que le retrait.

Ceci confirme la complexité des modalités de la diminution de l’exposition de la population : en effet, contrairement au retrait, la diminution ne provoque pas d’augmentation de la peroxydation lipidique dans le produit et au niveau du côlon. Nous proposons que cette hausse de la peroxydation observée pendant le retrait explique pourquoi ce dernier ne protège pas plus que la diminution contre la carcinogenèse colorectale.

En conclusion et, sur la base de cette étude dans un modèle animal, la diminution de la dose de nitrites dans les produits cuits est une solution qui permet à très court terme de réduire l’exposition de la population à l’additif tel que recommandé par l’Anses, de réduire la formation de composés nitrosés (nitrosamines et fer nitrosylé), de maîtriser le risque listeria et la peroxydation lipidique et le risque de carcinogenèse colorectale.

Référence

7. Guéraud, F., Buisson, C., Promeyrat, A. et al. Effects of sodium nitrite reduction, removal or replacement on cured and cooked meat for microbiological growth, food safety, colon ecosystem, and colorectal carcinogenesis in Fischer 344 rats. npj Sci Food 77, 53 (2023). https://doi.org/10.1038/s41538-023-00228-9
8. Bastide N. M., Chenni F., Audebert M. et al. (2015). A Central Role for Heme Iron in Colon Carcinogenesis Associated with Red Meat Intake. Cancer Res, 75 (5), 870-879. DOI: https://doi.org/10.1158/0008-5472.CAN-14-2554

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6. Peut-on aller jusqu’au retrait des nitrites dans les produits cuits en toute sécurité ?

L’absence de différence d’effet entre retrait et diminution sur la carcinogénèse colorectale pose question. Les données présentées dans ce préprint suggèrent que la peroxydation lipidique qui survient dès lors que les nitrites sont diminués et encore plus lorsqu’ils sont supprimés est en jeu pour expliquer cette absence d’effet supplémentaire du retrait par rapport à la diminution.

Les travaux précédents de Toxalim d’INRAE ont largement démontré qu’enrichir une charcuterie cuite en antioxydants (vitamine E, extrait de grenade, de raisin…) permet de limiter cette peroxydation lipidique qui s’observe pendant la digestion.

Les chercheurs pensent qu’il est possible de viser une très forte baisse des nitrites voire leur retrait, à condition que les produits soient enrichis d’un apport en antioxydants pour limiter la peroxydation, contrer ses effets négatifs et mieux protéger ainsi le consommateur.

C’est pourquoi les équipes INRAE ont lancé des nouvelles études en janvier de cette année, pour identifier des antioxydants efficaces testés dans les formulations de produits, capables de limiter la peroxydation observée lors du retrait des nitrites. Les résultats sont attendus dès fin 2023.

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7. Existe-t-il aujourd’hui des alternatives saines et sûres pour remplacer les nitrites dans les charcuteries cuites ?[1]

Dans son avis de juillet 2022, l’Anses a indiqué manquer de données portant sur l’efficacité antimicrobienne et toxicologique des alternatives aux nitrites. Dans ce contexte, INRAE a conduit depuis 2021 des études pour évaluer l’effet de plusieurs solutions présentées par les industriels comme alternatives aux nitrites sur une charcuterie cuite standard (jambon blanc cuit). Ces solutions sont actuellement sur le marché et une est en développement (à base de ferments).

  • La formulation à base de bouillon de légumes (naturellement riche en nitrates transformés en nitrites dans le produit) donne des résultats identiques à la dose de référence de nitrites (120 ppm). Les résultats obtenus confirment la présence de composés nitrés et nitrosés dans les produits tout en apportant pour la première fois la démonstration d’une absence d’effet protecteur sur la promotion de la carcinogenèse colorectale. Cette formulation longtemps présentée comme une alternative n’en est donc pas une.
  • L’alternative basée sur les ferments lactiques et extrait de levure qui est en cours de développement n’a pas limité la croissance de listeria. Cette formulation (sans apport d’agent nitrosylant ou nitrosant) a induit une réduction complète de l’exposition aux composés nitrosés et a annihilé leur néoformation fécale mais a conduit à une très forte augmentation de la peroxydation lipidique. Nous proposons que cette très forte augmentation de la peroxydation explique qu’aucun effet protecteur sur la carcinogénèse au stade précoce n’ait été observé.
  • La solution riche en polyphénols et vitamine C induit une tendance, mais non statistiquement significative, à diminuer la carcinogenèse colorectale dans le modèle animal, par rapport à la teneur de référence à 120 ppm. Cependant on observe une présence forte de fer nitrosylé au niveau du côlon, traduisant la présence dans cette alternative de composants favorisant la formation de composés nitrosés. Cette formation importante de fer nitrosylé au niveau du côlon peut expliquer l’absence d’effet protecteur significatif malgré la présence de polyphenols.  Concernant les effets sanitaires, on observe dans cette solution une moins bonne maîtrise de la croissance de listeria, mais le risque microbiologique peut être globalement maîtrisé via cette alternative si leur utilisation est accompagnée d’une réduction de la durée de vie des produits.

Ces premiers résultats sur les solutions dites alternatives soulignent l’importance d’une évaluation préalable par des équipes académiques capables de mesurer les effets sur la santé (risque de cancer) et de suivre les néoformations de composés toxiques pendant la digestion avant toute mise sur le marché.

[1] Les charcuteries cuites désignent tous les produits cuits, essentiellement à base de viande de porc, comme les jambons blancs cuits, les pâtés, les rillettes, les boudins et les andouilles… Ces produits se distinguent des salaisons, sans cuisson : jambon cru, saucissons, chorizo, et des saucisses à cuire.

Enfin, concernant l’ensemble de cette étude, il faut noter que les données, sur un modèle animal, sont des éléments nécessaires mais non suffisants à une extrapolation définitive à l’humain des conclusions issues de ce travail. Ainsi dans l’avis de l’Anses de juillet 2022 sur les impacts de la consommation de nitrates et nitrites, l’évaluation des risques associés à l’usage de ces additifs s’est basée sur une analyse systématique de la littérature scientifique et des études répétées. Pour autant, à l’image de l’impact des travaux d’INRAE sur un autre additif (le dioxyde de titane ou E171), avec le même modèle animal, cette étude peut être utile au gestionnaire de risques pour proposer des actions sur la base du principe de précaution.

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8. Autres effets sur la santé ? Que sait-on du lien entre consommation de nitrites et risque de diabète de type 2 et d’hypertension ?

En janvier 2023, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, d’INRAE, de l’université Sorbonne Paris Nord, de l’université Paris Cité et du Cnam, au sein de l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Eren-Cress) se sont intéressés à l’association entre nitrites et nitrates alimentaires et la survenue du diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires. Les scientifiques ont analysé les données de santé et d’exposition aux nitrites et nitrates de 104 168 adultes français et françaises participant à l’étude de cohorte NutriNet-Santé. Les analyses statistiques suggèrent une association entre la consommation de nitrites, en particulier en provenance d’additifs alimentaires, et un risque accru de diabète de type 2 [9] mais aussi d’hypertension [10]. Cependant, ces résultats doivent être répliqués dans d’autres cohortes, et confirmés avec d’autres approches, afin d’apporter des preuves suffisamment solides.

Références
9. Srour B., Chazelas E., Druesne-Pecollo N. et al. (2023). Dietary exposure to nitrites and nitrates in association with type 2 diabetes risk: Results from the NutriNet-Santé population-based cohort study. PLoS Med, 20(1):e1004149. doi: 10.1371/journal.pmed.1004149. eCollection 2023 Jan.
10. Srour B., Chazelas E., Fezeu L.K. et al. (2022). Nitrites, Nitrates, and Cardiovascular Outcomes: Are We Living "La Vie en Rose" With Pink Processed Meats? J Am Heart Assoc, 11(24):e027627. doi: 10.1161/JAHA.122.027627. Epub 2022 Dec 19.

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