Changement climatique et risques 4 min
Cédric Perrot, quand l’électrotechnique se met au vert
Chambres froides ou climatisées, serres fixes ou mobiles…. Depuis de nombreuses années, Cédric Perrot déploie des connaissances et un savoir-faire hors-pair en faveur des équipements expérimentaux mobilisés dans des projets d’écophysiologie.
Publié le 03 décembre 2019
Au cœur du pays mélusin, entre scarabée géant et vaisseau de science-fiction, s’élève Siclex. Pour le commun des mortels, c’est un simulateur de climat extrême conçu pour étudier l’adaptation des prairies au changement climatique. Pour Cédric Perrot, assistant-ingénieur dans l’unité de recherche pluridisciplinaire Prairies et plantes fourragères – URP3F du Centre Inra Nouvelle-Aquitaine – Poitiers, c’est LE dispositif expérimental par excellence, celui auquel il a travaillé pendant de nombreuses années, celui qui associe plusieurs équipements et innovations qu’il a concoctés.
Un aboutissement, surement pas, plutôt une (très) belle réalisation qui trouve toute sa place dans le parcours professionnel de Cédric !
De l’expérience industrielle à la recherche publique
Un peu de mécanique par-ci, un peu d’électronique par-là, Cédric Perrot opte finalement pour le Génie électrotechnique. Son baccalauréat en poche, celui qui, tout jeune déjà, aimait à bricoler avec son père, se spécialise progressivement en Génie des systèmes industriels. Son parcours scolaire est brillant, il est major de promotion durant toutes ses études !
L’industrie lui tend les bras. Il préfère l’Inra où il est recruté en 2004, en qualité d’électrotechnicien. Ce poste lui convient d’autant mieux qu’il lui offre des activités différentes de que ce que pouvait lui proposer le secteur auquel il était prédestiné et qu’il lui permet de rester dans sa région natale.
À l’Inra, il n’y a pas que des gens qui travaillent dans les laboratoires
Au sein de son unité, Cédric va prendre en charge la maintenance des chambres de cultures et des serres : température, humidité, questions électriques ou mécaniques… les besoins sont importants, les réglages fins. Il en profite pour assurer quelques développements spécifiques autour des capteurs ou des chaines d’acquisition. Très vite, il constitue un binôme de choc avec son collègue Christophe de Berranger, plutôt orienté mécanique. A l’actif du mini bureau d’études que les deux compères constituent, de nombreuses réalisations que Cédric conçoit et met en service et dont il rédige les dossiers techniques.
Parmi elles, Climascope, une table XY destinée à caractériser le rayonnement lumineux reçu par les plantes dans les chambres de culture, Marscope, un dispositif similaire utilisé en extérieur ou encore Racinator, une machine à laver…. les carottes de sol pour en extraire les racines de plantes. Une complexité grandissante, un défi chaque fois renouvelé et toujours la même satisfaction pour Cédric. « Au fur et à mesure, on maîtrise plus de choses, on se sent plus à l’aise sur ce qui a demandé du temps auparavant ».
On apprend en même temps
Ses compétences l’emmènent vers d’autres dispositifs expérimentaux. Cédric met à profit sa table XY dans le cadre de l’Ecotron IleDeFrance – un dispositif qui donne accès à une gamme complète d’instruments dédiés à la microbiologie de l’eau et à la bio-géochimie. Il intègre des mats de mesure et des capteurs au sol sur le Soere ACBB, un dispositif expérimental destiné à capter les évolutions à pas de temps long du système sol-végétation, de son environnement et des différentes rétroactions qui les gouvernent. Projets ponctuels ou collaborations au long cours, il aime la diversité des contacts qu’il noue.
En 2009, alors que Christophe de Berranger est parti vers d’autres horizons, Eric Roy rejoint Cédric. Parmi les nombreuses choses que le nouveau duo mène à bien, des capteurs, des chaines d’acquisitions, des réseaux de communication, des boucles de régulation….
Cédric travaille, forme et se forme, partage….
Il parle désormais Python, un langage informatique que pratiquent la plupart des scientifiques : automatisme et régulation pour Cédric, construction de modèles et boucles de rétroaction pour les chercheurs et surtout adéquation pour tous. Il va ainsi créer de nombreuses interfaces, de la simple automatisation des pesées d’une balance et leur enregistrement dans un fichier de calcul organisé à l’interface de Siclex soit pas moins de 10 000 lignes de code !
De Validate à Siclex
2008 : le rideau s’ouvre sur la praire…. Le projet Validate (ANR 2008-2011) s’intéresse à la vulnérabilité des prairies et des élevages au changement climatique et aux évènements extrêmes. A Lusignan, en plein champ, un dispositif expérimental prend forme : des stores permettent d’intercepter la pluie et de générer des épisodes de sécheresse, un système de chauffage permet d’élever la température au sol. Cédric est aux commandes… électrotechniques de ce projet. Mais les stores ne résistent guère aux vents.
Siclex pointe son nez en 2014 sous l’impulsion de Jean-Louis Durand, directeur de l’URP3F. Prospection, cahier des charges, budget, appel d’offre occuperont Cédric et ses collègues pendant de nombreux mois. Le projet est d’envergure, l’objectif ambitieux, l’originalité de mise.
Le premier coup de pelleteuse est donné en février 2017, le chantier est livré à l’automne de la même année. Du lancement du projet à sa finalisation, Cédric est sur tous les fronts, se réservant d’automatiser ensuite l’ensemble pour pouvoir faire du sur-mesure. Les premiers essais débutés en mars 2018 permettront à Cédric d’éprouver tout le dispositif.
Mini CV |
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40 ans, marié, deux enfants
Depuis 2004 Assistant-ingénieur, Unité de recherche pluridisciplinaire Prairies et plantes fourragères – URP3F, Centre Inra Nouvelle-Aquitaine – Poitiers
2003 DESS Génie des systèmes industriels, option Machines spéciales, Univ. Poitiers (86) |
A court terme, Cédric sait qu’il y a encore du travail sur Siclex - les futurs développements concerneront la température et le CO2. A long terme, il se laisse aller à rêver… Pourquoi pas un deuxième Siclex qui permettrait d’ouvrir le champ des possibles à d’autres partenaires ou à de nouveaux projets ? Plus pragmatiquement, Cédric souhaite aller plus loin en matière de bases de données temporelles tout en formalisant un peu plus les données acquises.
« Je ne me vois pas changer de métier, je suis toujours passionné par ce que je fais. Siclex, c’était déjà un très gros morceau mais il y a encore de quoi mouliner beaucoup de techniques pour faire d’autres projets innovants » s’enthousiasme-t-il.
Des projets, il en a déjà plein, scientifiques lorsqu’il est question de caractériser l’environnement sous des panneaux solaires, personnel lorsqu’il s’agit de finir la construction d’une maison. « Ce sera la troisième » compte-t-il modestement. De briques et de ciment, comme celle des trois petits cochons, elle n’en sera que plus solide, à l’image des engagements de Cédric, professionnels tout comme personnels puisqu’il est conseiller municipal de son village viennois.