Biodiversité Temps de lecture 2 min
Les animaux sauvages face au stress
L’exposition répétée à des facteurs de stress a des conséquences physiologiques, notamment sur le système immunitaire. Des travaux de recherche au laboratoire Comportement et écologie de la faune sauvage (CEFS) du centre INRAE Occitanie-Toulouse ont montré que cette relation stress et immunité chez les chevreuils variait en fonction des profils comportementaux.
Publié le 03 février 2023

Stress et fonction immunitaire
Pour mieux comprendre l’adaptation des animaux sauvages au stress induit par les activités humaines et ses conséquences sur leur immunité, et donc leur santé, des scientifiques du laboratoire CEFS ont conduit une expérimentation. Celle-ci visait à analyser la relation stress - immunité en prenant en compte les profils comportementaux individuels de 13 chevreuils. Ces animaux d’élevage ont été soumis à un challenge immunitaire par une vaccination anti-rage lors d’une capture, après laquelle ils ont été relâchés dans leur enclos.
Chez certains chevreuils, la teneur moyenne en hormones (glucocorticoïdes*) augmentait dans les semaines suivant la capture. Dans le même temps, ces individus présentaient aussi une augmentation de plusieurs marqueurs de l’immunité (innée et adaptative), ainsi qu’un comportement réactif : bas niveau d’activité, peu craintif face à la nouveauté, et docile à la manipulation. À l’inverse, les individus plus proactifs (plus actifs, plus craintifs et moins dociles) ont montré une diminution des même marqueurs immunitaires.
Chez la plupart des individus, une élévation chronique des glucocorticoïdes en raison d’une exposition répétée à des facteurs de stress altère la fonction immunitaire. Pour la faune sauvage, les quelques études disponibles aboutissaient à des résultats contradictoires ou à une absence de relation qui pouvait être masquée par des différences de profils individuels. En théorie, les réponses physiologiques, comme l’immunité ou la sécrétion de cortisol, et les traits comportementaux (niveau d’activité, réponse au stress ou à la nouveauté) sont régis par les mêmes principes d’apport d’énergie. Ils devraient donc varier ensemble et ainsi définir des profils stables et propres à chaque individu.
Le profil comportemental lié à la réponse de stress
« Notre étude met en évidence un lien entre le profil comportemental et la réponse physiologique et immunitaire au stress à l’échelle individuelle, souligne Hélène Verheyden, directrice du laboratoire CEFS. Nos résultats suggèrent que l’immunité des grands mammifères peut être influencée par le taux de glucocorticoïdes mais aussi par leur profil comportemental. Cette étude montre l’importance de considérer ensemble la variation des traits comportementaux et physiologiques pour comprendre les relations stress - immunité et ainsi, évaluer les conséquences sur la santé et la circulation des maladies à l’interface homme - faune sauvage ».
Ces travaux ouvrent des perspectives pour intégrer les aspects mêlant profils comportementaux et réaction de stress, et comprendre les implications sur la valeur adaptative ainsi que sur la circulation des agents pathogènes, et donc la santé de la faune sauvage.
*Les glucocorticoïdes naturelles, la corticostérone ou cortisol, sont des hormones circulantes indispensables à la vie qui régulent notamment l’apport, le stockage et la distribution de l’énergie dans l’organisme.
Référence bibliographique :
Carbillet J, Rey B, Palme R, Monestier C, Börger L, Lavabre T, Maublanc ML, Cebe N, Rames JL, Le Loc’h G, Wasniewski M, Rannou B, Gilot-Fromont E and Verheyden H. 2022. Covariation between glucocorticoids, behaviour and immunity supports the pace-of-life syndrome hypothesis: an experimental approach. Proc. R. Soc. B 289: 20220464. https://doi.org/10.1098/rspb.2022.0464 .