Alimentation, santé globale 3 min

Modélisation de la propagation de la grippe aviaire sur les marchés de volailles vivantes en Asie

COMMUNIQUÉ DE PRESSE - Une nouvelle étude à laquelle INRAE a participé révèle la vitesse à laquelle se propage la grippe aviaire dans les marchés de volailles vivantes en Asie. Les scientifiques du programme One Health Poultry Hub ont modélisé la propagation de la grippe aviaire dans ces marchés en intégrant pour la première fois des données biologiques prélevées sur le terrain. Ils ont focalisé leur étude sur le virus H9N2 de la grippe aviaire, peu virulent pour les volailles mais constituant un risque majeur dans la propagation et l’évolution de la maladie. Leurs résultats, publiés dans Nature communications, montrent que 10 % des oiseaux arrivent déjà contaminés sur les marchés et plus de 90 % des oiseaux susceptibles d’être contaminés sont infectés en moins de 24 heures sur le marché s’ils y demeurent au moins une journée. Ils plaident en faveur de l’adoption de mesure de prévention en amont des marchés chez les transporteurs et les éleveurs pour réduire le risque de propagation du virus, notamment par des stratégies de vaccination.

Publié le 02 mai 2024

illustration Modélisation de la propagation de la grippe aviaire sur les marchés de volailles vivantes en Asie
© One Health Poultry Hub -Naomi Marks

En Asie, les marchés de volailles vivantes sont omniprésents et très populaires. Ils constituent une tradition culturelle forte où le consommateur sélectionne personnellement les oiseaux vivants. Mais ils sont également des points névralgiques de propagation et d’évolution des virus de la grippe aviaire, comme le montre une étude précédente du programme One Health Poultry Hub. Le virus H9N2 de la grippe aviaire est le plus répandu dans les élevages avicoles. Bien que peu virulent pour les oiseaux, il peut être responsable de pertes importantes de production et représente un risque économique majeur en élevage. Il peut également se transmettre aux humains et est impliqué dans l’émergence de nouveaux variants de la grippe aviaire comme le virus H5N1. Il présente donc un risque potentiel de pandémie.

C’est pourquoi les scientifiques ont modélisé la propagation de ce virus dans les marchés de volailles vivantes en intégrant pour la première fois des données biologiques de terrain prélevées sur des marchés au Bangladesh. Leurs résultats montrent que :

  • Plus de 9 poulets sur 10 qui entrent sur le marché sans avoir été exposés au virus H9N2 sont infectés en moins de 24 heures s’ils y demeurent au moins une journée.
  • Un oiseau infecté par le virus peut devenir contagieux en moins de 5 h 30.
  • 1 oiseau sur 10 arrive déjà infecté sur les marchés.

Le modèle développé permet aux scientifiques d’aller plus loin et d’évaluer l’impact de potentielles mesures sanitaires pour réduire la prévalence du virus H9N2 sur les marchés vivants.

Actuellement, les interventions de santé publique vétérinaire pour limiter la propagation du virus se focalisent sur les marchés eux-mêmes. Elles incluent notamment l’interdiction du maintien des oiseaux sur les marchés durant la nuit, le renforcement des « jours chômés » sur les marchés, et la séparation des différentes espèces d’oiseaux présentes. Cependant les résultats de l’étude montrent que ces mesures sont peu susceptibles de réduire efficacement le risque d’exposition humaine au virus si elles ne sont pas complétées par des mesures mises en œuvre tout au long du circuit approvisionnant les marchés. Les stratégies de prévention des pandémies doivent donc également viser les élevages et les transporteurs de volailles dans les pays où le virus est endémique pour réduire le nombre d’oiseaux infectés introduits dans les marchés. En particulier, leurs résultats plaident en faveur d’intervention à volets multiples, notamment des stratégies de vaccination des oiseaux destinés aux marchés de volailles vivantes.

Les nouveaux éclairages apportés par cette étude vont être intégrés au modèle informatique EPINEST, le premier outil informatique développé par le programme One Health Poultry pour suivre les virus et bactéries dans les élevages.

One Health Poultry Hub est un programme interdisciplinaire de recherche et développement travaillant à répondre à la demande croissante de viande de volaille et d’œufs en Asie tout en minimisant les risques de santé publique. Le programme rassemble des scientifiques de laboratoires, en recherche clinique, vétérinaires et en sciences sociales de 27 institutions de 10 pays adoptant une approche One Health pour fournir une alimentation saine et durable. Lancé en 2019, One Health Poultry Hub mène des projets au Bangladesh, en Inde, au Sri lanka et au Vietnam. https://www.onehealthpoultry.org/

Le programme est financé par le Global challenge research fund (GCRF) du Royaume-Uni.

 

La grippe aviaire : une maladie provoquée par différents virus

Les virus de grippe aviaire appartiennent au type A. Les virus de type A sont caractérisés par les sous-types des protéines de 2 protéines de surface, l’hémaglutinine (H) et la neuraminidase (N). 16 sous types de H, 9 de N, avec toutes les combinaisons possibles, présentes dans les oiseaux sauvages, leur réservoir.

Lorsque ces virus infectent la volaille, certains peuvent devenir hautement virulents pour la volaille, c’est le cas notamment du H5N1.

Plusieurs sous-types viraux de grippe aviaire sont zoonotiques. Voir ci-dessous :

Les principaux sous-types d’influenza aviaire causant des cas humains (attention, les nombres correspondent aux cas reportés dans la région Asie-Pacifique de l’OMS)

https://www.who.int/westernpacific/wpro-emergencies/surveillance/avian-influenza

Cas humain récent de H9N2

https://www.who.int/emergencies/disease-outbreak-news/item/2024-DON514

 

 

Référence

Francesco Pinotti et al. Modelling the transmission dynamics of H9N2 avian influenza viruses in a live bird market, Nature Communications (2024) 01 May 2024 DOI : https://doi.org/10.1038/s41467-024-47703-9

Cette étude inclut des scientifiques du Royal veterinary college et de l’université d’Oxford au Royaume-Uni, de la City University de Hong-Kong en Chine, de l’université des sciences vétérinaires et animales de Chittagong au Bangladesh, et d’INRAE.

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