Alimentation, santé globale 4 min

Quand les cantines se mettent à table Commensalité et identité sociale

PARUTION - En croisant le regard de sociologues et d’anthropologues sur une grande diversité de situations de repas collectifs (restaurant d’entreprise, cantine scolaire, institution pour personnes âgées…), ce livre entend apporter à tous ceux qui s’intéressent à ces questions – que ce soit dans le cadre universitaire ou opérationnel – une analyse fouillée et rigoureuse du rôle majeur de ces repas dans la construction des identités et du lien social.

Publié le 01 juin 2020

illustration Quand les cantines se mettent à table Commensalité et identité sociale
© INRAE

L’ouvrage rassemble les résultats de recherches empiriques menées par des sociologues et des anthropologues spécialistes de la sociologie de l’alimentation. Il aborde de façon à la fois spécifique et croisée les questionnements soulevés par les publics et les professionnels des cantines. Ce faisant, il permet de dépasser les travaux généralement cloisonnés par types de publics et livre une approche transversale des supports et des modalités de la commensalité institutionnelle.

Trois parties mettent en évidence la diversité des problématiques qui traversent la question des repas pris en collectivité. Si certains sont propres à chaque public (les contraintes et l’organisation diffèrent selon le type d’établissement), d’autres sont communs à des publics très variés, comme la question de « trouver sa place à table », que l’on retrouve aussi bien à l’école qu’en Ehpad. La fonction sociale de la restauration collective, à travers l’acte commensal qu’elle instaure, en d’autres termes le « manger avec », est centrale, puisque interagir avec autrui et trouver sa place au sein du groupe et plus largement de la société constitue un des objectifs principaux de tout individu, quel qu’il soit.

 

Coordination éditoriale

Anne Lhuissier est sociologue, chargée de recherche, INRAE – CMH (UMR 8097, CNRS, EHESS, ENS)

Géraldine Comoretto est sociologue, chercheuse post-doctorante, Université de Versailles Saint-Quentin-en- Yvelines – Printemps (UMR 8085)

Aurélie Maurice est sociologue, maîtresse de conférences en sciences de l’éducation, Université Paris 13 Sorbonne Paris Cité – LEPS (EA 3412)

Co-éditions Quae-educagri  - coll. Sciences en partage – 160 pages, 1er juin 2020 – 29,50 euros

 

EXTRAITS

La socialisation aux repas collectifs qui s’exerce dès l’enfance ne se limite pas à une expérience alimentaire. Bien qu’elle ne soit pas négligeable, celle-ci se conçoit dans un continuum de règles et de normes qui confèrent au temps du repas à la cantine un ensemble d’enjeux. La confrontation des différentes expériences selon le type d’établissement et de public permet de mieux les saisir. Premièrement, l’organisation institutionnelle du service des repas dans les établissements revêt une importance majeure dans le façonnement des types de commensalité et de socialisation : self-service ou service à table, service par tablées ou par types de repas déterminent autant la temporalité et le contenu des repas que le niveau de confort et de plaisir à table. Cette organisation délivre aussi une série de repères que des modifications peuvent contrarier ; tel est le cas d’ouvriers migrants, dont la réorganisation de la cantine passant du service à table au self-service leur fait perdre les repères du repas « à la française ». Si la littérature sur les cantines a montré comment elles sont aussi des lieux de distinction sociale et de genre, l’ouvrage montre que s’y exercent d’autres formes de domination ou de relations sociales, fondées sur des critères moins structuraux et pourtant cruciaux tels que le prestige ou des capacités fonctionnelles ou linguistiques.

• L’autorité hiérarchique des cuisines collectives relève de la compétence des collectivités territoriales qui assurent la gestion des coûts d’approvisionnement, mais aussi le suivi nutritionnel des menus proposés. Lorsqu’une école se trouve engagée dans un programme de lutte contre le surpoids et l’obésité, cela dépasse le cadre de la restauration collective pour s’étendre à un périmètre éducatif plus large comprenant l’espace de la classe et de la cour de récréation. Henri Bergeron montre avec le programme Epode*comment ces programmes fonctionnent à partir d’une coordination assurée par l’agence qui se charge de former un chef de projet (généralement employé par la collectivité territoriale) et qui se chargera par la suite de la coordination locale entre la municipalité, l’école et d’autres partenaires du monde associatif. L’objectif est de conduire sur le terrain des actions éducatives à destination des enfants et des adolescents qui, dans certains cas, dépassent la dimension de l’éducation nutritionnelle et recouvrent plus largement la promotion de la santé. Ces actions s’apparentent à « un inventaire à la Prévert : “semaine du goût”, “salad’ bars” (mise à disposition de fruits et légumes à la cantine, dont les enfants se servent à volonté), “quinzaine sportive”, ateliers cuisine (“pour manger mieux sans dépenser plus”), fermeture d’une rue pour faire marcher davantage les écoliers, “pédibus” (organisation d’un circuit pour accompagner à pied les enfants de l’école à leur domicile), “jardin solidaire” (culture de légumes dans un jardin communal et cuisine de ces mêmes légumes), réduction de la collation du matin, “baby gym”, randonnées, aménagement de la cour d’école, etc. » (Bergeron et al., 2011, p. 215). Dans cette liste, la restauration scolaire ne se trouve finalement impliquée que dans deux actions sur les onze citées. L’implication est faible au regard du nombre d’actions menées, mais les attentes sont en revanche très fortes à son égard, notamment sur sa capacité à transformer les habitudes et les préférences de consommation du public ciblé ainsi qu’à les rendre conformes aux prescriptions normatives en matière de nutrition.

*Ensemble, prévenons l’obésité des enfants.

 

 

 

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