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Fabrice Marty, directeur général délégué aux Ressources d’INRAE
Aujourd’hui directeur général délégué aux Ressources d’INRAE, Fabrice Marty était précédemment, en 2017, devenu directeur général délégué de l’Inra pour l’appui à la recherche, à 48 ans. Il est un fidèle de l’Inra depuis plus de 20 ans, entré par la recherche avec une thèse d’économie sur les filières de qualité et d’origine. Conseiller de la présidence en 2001, DG du Groupe d'étude et de contrôle des variétés et des semences (GEVES) en 2004, DRH depuis 2012, il a construit sa personnalité professionnelle au gré d’expériences variées et structurantes dans et en dehors de l’Institut.
Publié le 03 juillet 2017 (mis à jour : 27 décembre 2019)
Pour Fabrice Marty, rejoindre INRAE c’est travailler dans un institut qui porte des problématiques sociétales majeures touchant notre alimentation, notre agriculture et notre environnement, inscrites dans les objectifs de développement durable des Nations-Unies. C’est ainsi la possibilité de faire converger valeurs personnelles et sens du travail. « Dans cette boite, les RH sont au cœur » explique le DG délégué aux Ressources du nouvel institut issu de la fusion entre l’Inra et Irstea. « L’équilibre entre vie privée et vie professionnelle est la clé » ajoute-t-il. Temps partiel, télétravail, et congés paternité facilités sont déjà une réalité, et bientôt la flexibilité du temps de travail. Nous misons sur l’appui du numérique dans tout ce qu’il a de positif.
Travailler à l’INRAE, c’est s’inscrire dans un réseau mondial, où sont favorisés la diversité des cultures et des parcours, les sciences ouvertes, participatives et le débat. Premiers à avoir obtenu le label européen HR Excellence in Research pour notre politique de Ressources Humaines appliquée aux chercheurs et chercheuses, en 2010, nous l’avons ensuite étendu à tous les personnels. La diversité est l’autre dynamique essentielle : « l’INRAE doit aussi refléter la société » précise-t-il. Le label diversité déjà obtenu et la labellisation Egalité en cours d’obtention cette année témoignent de cet engagement.
« Le développement durable n’est pas seulement l’horizon de nos recherches, il doit devenir notre quotidien de travail » poursuit-il. « Nous souhaitons développer la bienveillance au travail : permettre l’expérimentation, le droit à l’erreur ». Enfin, INRAE c’est aussi 1 milliard de budget, 10 000 ha d’expérimentation, 1 100 000 m² de surface bâtie et un patrimoine remarquable… Le développement durable est entré dans la gestion de nos achats et de nos domaines expérimentaux. La plupart sont engagés dans une démarche de système de management environnemental, inscrite dans une action collective. Mais, nous devons encore aller plus loin, et c’est l’un des chantiers d’INRAE.
Piloter les décisions de près de 10 000 collaborateurs
« J’adore cette boite ! » La phrase a fusé, libérée par l’accent chantant du Ségala. Les yeux sombres se sont allumés, presque adoucis. Le visage s’est ouvert, pour sourire franchement, d’un coup. Lorsqu’il parle de l’nstitut, Fabrice Marty, nommé DGDAR (Directeur général délégué à l’appui à la recherche), après 5 années à la tête des ressources humaines de l’Inra, baisse la garde… Pas très longtemps, c’est vrai. Suffisamment toutefois pour prouver son attachement quasi-viscéral, au gré de ce parcours amorcé en 1995 avec son directeur de stage en économie Bertil Sylvander au centre Inra de Toulouse. Lui le petit-fils de semencier aveyronnais, le natif de Rieupeyroux, lui, l’élève au caractère déja affirmé du lycée de Figeac, au cœur des années 80.
Le système au service du collectif
Car si la vie professionnelle de Fabrice s’est plusieurs fois entrelacée en dehors de l’Institut, elle revient désormais, dans l’arrondi d’une nouvelle boucle, le porter à 48 ans à la tête d’un mandat de 4 ans et d’un contingent impressionnant de 2 000 collaborateurs. « Le fil conducteur de l’appui à la recherche, c’est la déclinaison de la politique scientifique de l’établissement, précise-t-il, en redressant les épaules comme pour mieux déployer son argumentaire. Un projet scientifique qui va demander des investissements, des recrutements, de programmer le budget sur 4 ou 5 ans, d’être réactif et proche des unités… C’est ce type d’analyse et de préoccupations qui va piloter les décisions au niveau des 10 000 personnes de l’Institut… »
Sous le dirigeant gestionnaire en approche, le patron pilote du plan d’action du développement RH à l’Inra, référence depuis 2012, affleure encore : « Qualité de vie au travail, confiance, intérêt collectif… La fibre RH, j’y suis attaché. C’est une vraie fierté d’avoir porté la RH au niveau stratégique, les équipes et ce réseau vont me manquer ». Il pose calmement, une à une les cartes maitresses qui ont structuré sa candidature, retenue au final parmi 21 dossiers. Et l’Aveyronnais de compléter malicieusement son jeu d’atouts déjà bien garni : « Authenticité et convivialité. Je suis direct, je n’ai qu’une parole. Les syndicats et mes collaborateurs l’ont compris je pense… Je ne changerai pas. »
Deux transitions à préparer
Pas d’appréhension visible donc chez lui, à l’idée de conduire l’institut dans deux transitions majeures de la décennie, le numérique et la relocalisation de 13 labos à Saclay : « Le temps et la préparation ne sont pas des variables d’ajustement. Il faut les respecter. On a tout à concevoir, à outiller, à animer. » L’accent chante un peu moins, la voix gagne en intensité. « Nous devons être préparés, empathiques, transparents. Bien choisir et bien expliquer ce qu’on met en avant : le sens de la démarche, son calendrier… » Pas d’appréhension mais une bonne connaissance des risques finalement.
Vrai que lorsqu’on a participé à la création des unités mixtes de recherche (UMR) au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, qu’on a été le plus jeune conseiller ministériel de l’ère Jospin (30 ans) en charge des OGM puis conseiller consommation et répression des fraudes pour Marylise Lebranchu et qu’on a travaillé sa thèse sur le traitement de l’incertitude dans les filières d’appellations géographiques, le risque, on s’en fait un partenaire plus qu’un ennemi.
Management participatif et gestion des risques
Lorsqu’à 35 ans, on dirige le Geves (Groupe d'étude et de contrôle des variétés et des semences) en lien direct avec les multinationales, pour le restructurer et le relocaliser à Angers, vrai aussi que la modernisation accélérée vous construit par nécessité plus que par envie, une carapace, une distance avec l’émotion. Instinctivement Fabrice Marty a préféré à l’époque s’enrichir d’un mental de coach et se plonger l’esprit dans les grands standards du blues. Il a préféré se construire progressivement, patiemment, un peu moins proche de tous, un peu plus fort tout seul, pour ne pas se fracasser plus tard et ailleurs d’un coup d’un seul, contre les parois de l’urgence, de la déception, de la frustration…
Il ne faut d’ailleurs pas chercher plus loin la genèse de ce choix plus que structurant de la fonction RH dans une carrière en apparence très « programmée » de haut fonctionnaire, rompu aux échanges avec les tutelles, habitué au jeu du pouvoir et des coulisses. Il est plus que logique finalement, le virage de cet Igref (1), qui a choisi par conviction de tracer la nouvelle route vers 2020 pour les 10 000 agents de l’Inra, dans le sillon de François Houllier, dont il fût l’adjoint à la direction générale déléguée à la Science et à la demande de Marion Guillou, présidente de l’Inra jusqu’en 2012.
Méditation et sensibilités
C’est sans doute le « pourquoi et le comment » de ces décisions et de cette mission qu’il se murmure en lui-même, lorsqu’il déconnecte quelques dizaines de minutes, aux deux extrêmes de la journée. Lorsqu’il médite alors profondément pour se ressourcer, se recentrer, se construire un peu plus. Une route intérieure qu’il dessine aussi pour parler fièrement, avec tendresse et émotion, de ce fils de 21 ans qui prépare le concours de la magistrature en cinquième année à Sciences Po. Apaisé, lorsqu’il prend aussi le temps d’analyser ce parcours personnel avec recul, de l’apprécier avec fierté et d’affirmer son culte de la liberté, son amour de la diversité, auprès de son fils et de son compagnon.
Et quand le boulot reprend la main pour conclure l’entretien, Fabrice Marty ne parle toujours pas de priorités, de chantiers, d’enjeux. Il évoque sereinement pour le futur de l’Inra deux « sensibilités », presque deux convictions : le management participatif et la gestion des risques. Derrière ces mots, entre patrimoine de la maison et perspectives nouvelles, ressurgit intacte la passion du jeune conseiller de Marion Guillou du début des années 2000. Ces années qu’il évoque avec autant d’appétit et de gourmandise que son terroir natal. C’est donc tellement vrai, qu’il l’adore cette « boite » !
(1) Ingénieur du Génie rural, des eaux et des forêts
50 ans, un fils
1998 : soutenance de thèse Inra/CNRS, Université Paris X Nanterre : Pluralité de rationalités et traitement de l’incertitude (dir. R. Salais)
1999-2000 : conseiller technique sécurité des aliments (Erika, listériose, salmonellose) et des biens de consommation, gestion de dossiers sensibles pour le gouvernement Jospin (coordination interministérielle OGM)
2001-2004 : conseiller DG et présidence Inra (Marion Guillou et Bertrand Hervieu) et secrétaire général du collège de direction de l’Inra
2004-2008 : direction générale du GIP Geves (310 équivalents temps plein, budget de 20 millions d'euros, 6 sites)
2008-2010 : Chef du service prévention des risques sanitaires de la production primaire, ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche
2010-2011 : chef de projet adjoint de création du campus Paris-Saclay (Deux milliards d’euros, 21 établissements, gestion de la collaboration avec l’aménagement par l’EPPS)
2011-2012 : adjoint au directeur général délégué scientifique (DGDS) Inra
2012-2017 : directeur des Ressources humaines de l’Inra, prévention des risques et coordination des affaires juridiques.
2017 : directeur général délégué à l’Appui à la Recherche de l’Inra
2020 : directeur général délégué aux Ressources d'INRAE